Hervé (Florimond Ronger, dit) (1825-1892)

Hervé est né à Houdain (Pas-de-Calais) le 30 juin 1825 d’une mère espagnole. Son père, brigadier de gendarmerie, meurt dès 1835.

Madame Ronger emmène son fils à Paris. Elle trouve un emploi à l’église Saint-Roch où elle fait admettre le jeune garçon, qui avait une jolie voix et déjà un sens réel de la musique dans les chœurs de la maîtrise. Il apprend les rudiments du chant, de l’orgue et de l’harmonie

Mme Ronger comprend la vocation de Florimond. Elle réussit à lui faire donner des leçons par Elwart, professeur d’harmonie au Conservatoire. Elwart présente son élève à Auber, qui donnera au jeune garçon des leçons de composition.

En 1839, Florimond est organiste à Bicêtre, où sa famille emménage bientôt. De la fenêtre de sa chambre, il peut apercevoir les pensionnaires du alors célèbre hospice d’aliénés. En 1842, il leur fera chanter et jouer L’ours et le pacha, un vaudeville de Scribe et Saintine, qu’il a mis en musique.

Deux ans plus tard, il épouse la jeune Eugénie Groseille. Excellente musicienne, elle le remplace parfois à l’orgue car Florimond, chaque fois que possible, va, discrètement, gagner un petit cachet au théâtre. C’est d’ailleurs à cette époque qu’il adopte le pseudonyme d’Hervé pour le théâtre, Florimond Ronger pour ses activités d’organiste.

Cette situation, qui le conduisait à un dédoublement de sa personnalité, devait bien plus tard (1883) inspirer les librettistes de Mam’zelle Nitouche. Florimond-Hervé préfigurent Célestin-Floridor.

A la suite d’un concours, Florimond obtient en 1845, la place d’organiste très recherchée de l’église Saint-Eustache à Paris, qu’il devait conserver pendant 8 ans.

En 1847, il compose une pochade Don Quichotte et Sancho Pança, qui, après un passage au théâtre Montmartre est représentée à l’Opéra National (5 mars 1848). Hervé joue le rôle de Don Quichotte et Joseph Kelm, avec qui il devait se lier d’une amitié durable, celui de Sancho. Pour certains auteurs cette pièce est la véritable première opérette.

Hervé commence à être connu. En 1849,il devient chef d’orchestre à l’Odéon puis, l’année suivante au Palais-Royal, où il fait représenter quelques ouvrages de sa composition.

Il obtient un gros succès avec Les Folies-Dramatiques, spectacle en 5 actes, représenté en avant-première devant Napoléon III et sa cour (1853).

Hervé, à défaut d’un privilège de théâtre, qui lui est refusé, ouvre en 1854 un spectacle-concert dans une petite salle du boulevard du Temple qu’il baptise « Les Folies-Concertantes », puis quelque temps plus tard « Les Folies-Nouvelles ». Il présente dans cette salle de nombreux ouvrages de sa composition, qu’il interprète avec son ami Kelm : Le Compositeur toqué, La Fine fleur de l’Andalousie, Un drame en 1779…

En 1858,il s’en va chanter en province. A Marseille, il récolte des triomphes… A Montpellier, on le retrouve dans les rôles de ténorino, de trial et même de baryton léger (Jean des Noces de Jeannette).

En 1859, de retour à Paris, il devient chef d’orchestre aux « Délassements Comiques », où il fait représenter quelques ouvrages. En 1862, il repart en province. Il se rend même en Egypte.

L’année 1858 marque un tournant dans l’histoire de l’opérette française puisque désormais la réglementation, qui limitait le nombre des personnages sur scène pour un même ouvrage, est assouplie. Hervé, comme Offenbach, va pouvoir donner toute la mesure de son talent.

Il faudra attendre 1866, pour qu’Hervé s’investisse à son tour dans des ouvrages d’envergure (Offenbach avait créé Orphée aux enfers dès 1858). Les Chevaliers de la Table Ronde, opéra bouffe en 3 actes, livret de Chivot et Duru est le prélude aux grandes opérettes du « compositeur toqué » comme on aimait à le surnommer.

L’Œil crevé (V’lan dans l’œil) en 1867, Chilpéric en 1868 et Le Petit Faust en 1869 sont les trois chefs d’œuvre de ce génial musicien et acteur. En effet, dans Chilpéric, Hervé tient le rôle-titre, dans Le petit Faust, celui du docteur Faust. Les trois ouvrages obtiennent un succès considérable.

Pour tenir lui-même le rôle de Chilpéric à Londres, Hervé apprend en quelques mois l’anglais.

A partir de 1870, Hervé fait d’ailleurs la navette entre Paris et Londres.

Il continue à composer et fait représenter de nombreux ouvrages parmi lesquels La Belle Poule, interprétée par Hortense Schneider.

En 1878, il tient le rôle de Jupiter dans une reprise d’Orphée aux enfers, l’orchestre étant dirigé par Offenbach lui-même.

En 1879, débute le cycle des œuvres qu’il compose pour Judic, l’étoile du théâtre des Variétés.

Le plus célèbre des ouvrages de cette période reste Mam’zelle Nitouche(1883), dont la partition est d’une qualité rare. La musique sait être bouffonne tout en gardant des allures classiques. Jouée en province, reprise régulièrement, Mam’zelle Nitouche est restée pendant longtemps l’opérette la plus populaire d’Hervé, même si, en réalité, elle n’est pas la plus représentative de son art.

Aujourd’hui, Mam’zelle Nitouche a pratiquement déserté les scènes françaises. Par contre quelques directeurs ou producteurs se sont dernièrement intéressés ici et là à V’lan dans l’œil et au Petit Faust.

Les créations suivantes passèrent plus inaperçus. En 1886, Hervé quitte Paris pour Londres où un engagement très lucratif l’attend. Il réapparaît en France en 1892 où il donne Bacchanale ( 22 octobre), peu de temps avant sa disparition (3 novembre 1892).

Jean-Claude Fournier

— Références
Vous retrouverez Hervé dans « Opérette » n° 13, 28 , 49, 75, 84, 92, 104, 109, 165 & 178. Si l’un de ces articles vous intéresse, vous pouvez le consulter en allant sur notre page « Anciens numéros »
Fiches disponibles : Le Petit Faust, Mam’zelle Nitouche, Chilpéric,

— Œuvres lyriques
Légende : oc = opéra-comique, ob = opéra-bouffe, opé = opérette, v = vaudeville,  v opé = vaudeville-opérette, opé rev = opérette-revue, c-opé = comédie-opérette, sc = scène, sc com = scène comique, bm = bouffonnerie musicale, rev = revue, p c = pièce comique, folie-v = folie-vaudeville, sayn = saynète, fant = fantaisie, pant = pantomime, d lyr = drame lyrique
Le chiffre indique le nombre d’actes.(ou le nombre de tableaux s’il est suivi de« t »)

[1] sous le pseudonyme de Jules Brémont
[2] sous le pseudonyme de Louis Heffer
[3] Hervé ou Villebichot (A. de)
[4] avec Offenbach (Jacques) (?)
[5] sous le pseudonyme d’Alcindor = [Lecocq [Charles), Hervé, Legouix ] ou [Lecocq (Charles) seul (suivant sources)]
[6] avec Graziani (Maximilien), Raspail (G.)
[7] sous le pseudonyme d’Alcindor [Hervé, Coèdès (Auguste), Raspail (G.)]
[8] avec Raspail (G.)
[9] Hervé (?)
[10] avec Lecocq (Charles), Boulard (Marius)
[11] posthume
[a] = « tableau grotesque en 1 acte »
[b] = « trilogie mi-comico-lyrique »

Dernière modification: 29/02/2024