Phi-Phi

Henri Christiné (1867-1941)

 

1918. La France sort à peine d’un cauchemar qui a duré quatre années. Gustave Quinson est alors directeur de plusieurs théâtres dont le minuscule théâtre de l’Abri installé dans la cave d’un immeuble en pierres de taille, ce qui avait permis pendant les hostilités de braver les obus de la « grosse Bertha ». Pour succéder à une revue de Lucien Boyer et Albert Willemetz, Quinson demande à ce dernier de lui préparer « quelque chose ». Willemetz propose trois petits actes qu’il avait écrits sur une idée de Fabien Sollar, le directeur du « Rire » et de « Fantasio ». Quinson trouva l’histoire un peu mince et suggéra de la faire mettre en musique. Willemetz contacta Christiné et l’on se mit au travail. Quinson, qui était également directeur des Bouffes-Parisiens, se trouva brusquement sans spectacle pour ce théâtre. Il proposa à Willemetz et Christiné de monter sur cette scène l’ouvrage qu’ils préparaient. On ajouta quelques modèles, quelques musiciens, on agrandit le décor, on étoffa la partition et Phi-Phi débuta sa carrière aux Bouffes, non le 11 novembre 1918 comme prévu mais le douze pour « cause de victoire ».

Le succès ne fut pas immédiat, car les Parisiens, tout à la joie de la paix retrouvée, se défoulaient plutôt dans la rue. Mais petit à petit le succès se dessina et dès le mois de mars 1919, le théâtre ne désemplissait plus. L’opérette française, en déclin depuis plusieurs décennies, retrouvait avec Phi-Phi une nouvelle vigueur et se renouvelait enfin. La musique se composait de chansons et de quelques ensembles très simples et adoptait les danses à la mode : fox-trot, one step,… Peu de chanteurs, peu de musiciens, quelques choristes-danseuses, souvent un seul décor, ce qui permettait aux ouvrages de s’installer sur de petites scènes. Ce nouveau genre, qui débutait avec Phi-Phi, allait se maintenir tout au long des années vingt.

Phi-Phi se joua pendant 3 ans de suite pour la première série. Les rôles changèrent parfois de titulaires. C’est ainsi que dans le celui de Phi-Phi, on remarqua après Urban, Hemdey, Portal et Harry Mass ; dans celui de Le Pirée, après Dréan, Seylis, Kerny, Serjius et Tramel ; dans celui d’Aspasie, après Alice Cocéa, Clara Tambour, Germaine Kym et Jane Ader ; Alice Bonheur chanta Mme Phidias après Pierrette Madd et Norbert Foissy, Ardimédon après Ferréal.

Phi-Phi fit son tour de France et partit à la conquête de l’étranger. Albert Willemetz estimait, vers 1955, que l’ouvrage avait atteint dans le monde le chiffre de 40 000 représentations.

— L’argument

 L’action se passe dans l’atelier de Phidias, 600 ans avant Jésus-Christ.

Acte I

Le grand sculpteur Phidias, dit Phi-Phi, a reçu de l’État la commande d’un groupe représentant « L’amour et la Vertu fondent le Bonheur Domestique ». Comme modèle pour figurer « la Vertu », il choisit Aspasie, une « gamine charmante » qu’il a rencontrée dans les rues d’Athènes. La jeune fille vient lui rendre visite. Il la trouve tellement attirante qu’il s’empresse de lui faire une cour empressée, très empressée même. Voulant se défendre avec son ombrelle, Aspasie fait tomber les bras de la « Vénus de Milo », puis la tête de la « Victoire de Samothrace » !
Madame Phidias survient. Jalouse non sans raison, elle fait des remarques désobligeantes à son mari et à Aspasie qui se retire bientôt. 
Restée seule avec Le Pirée, secrétaire, serviteur et confident de son époux, Madame Phidias, épouse fidèle, lui raconte comment elle a éconduit un beau jeune homme qui l’importunait de ses assiduités. Ce beau jeune homme, qui n’est autre que le Prince Ardimédon, arrive à son tour. Gênée, Madame Phidias laisse Le Pirée seul avec le Prince. Mis en présence de Phi-Phi, ce dernier l’engage comme modèle pour symboliser « L’Amour ».

Acte II

Périclès, le maître de la Grèce, vient rendre visite à son sculpteur favori. En l’absence de Phi-Phi, il fait la connaissance d’Aspasie, qui arrive fort à propos. Périclès est à son tour conquis par cette délicieuse enfant. Sortie de Périclès, retour de Mme Phidias. Elle a tôt fait de congédier Aspasie en lui annonçant que son époux a renoncé à la prendre comme modèle. Madame Phidias estime que personne ne peut mieux qu’elle représenter « La Vertu ». Bon gré, mal gré Phi-Phi se résout à prendre sa femme comme modèle. La jeune femme prend alors la pose auprès d’Ardimédon. Le sculpteur trouve qu’ils manquent de naturel. Phidias étant appelé à l’extérieur, le Prince reste seul avec sa vertueuse partenaire qu’il n’a pas trop de mal à entraîner dans la chambre voisine.

Acte III

Le lendemain, dans son atelier, Phi-Phi surprend Ardimédon et sa femme dans les bras l’un de l’autre. Il les félicite d’avoir su trouver la pose idéale, et se met fiévreusement au travail, tout en s’étonnant que son épouse ne lui ait pas, comme d’habitude, demandé où il avait passé la nuit.
Mais voici Aspasie, Aspasie qui apprend au sculpteur qu’elle vient d’épouser Périclès, ce qui ne l’empêchera pas de poursuivre avec Phi-Phi une liaison qui s’est concrétisée la nuit précédente. Entrée de Périclès qui exige qu’Aspasie fasse partie du groupe de modèles. Qu’à cela ne tienne. Elle sera « L’Économie » et l’œuvre s’intitulera : « L’Amour et la Vertu, aidés par l’Économie, fondent le bonheur conjugal ».
Tout est bien qui finit bien dans cette histoire d’une haute moralité.

La partition

Acte I : Ouverture ; Chœur des modèles ; Couplets « C’est une gamine charmante » (Phi-Phi) : Couplets « Maître, lorsqu’on a vingt ans » (Phi-Phi, Aspasie) ; Couplets-valse « Je connais toutes les historiettes » (Aspasie) ; Couplets « Vertu, verturon, verturonnette » (Phi-Phi) :Air  « J’sortais des portes de Trézène » (Mme Phidias, Le Pirée, Phi-Phi) ; Ensemble « Hélas, faut-il si tôt », « C’est un modèle », « Pour l’amour » et final I

Acte II : Chœur des modèles ; Couplets « Ah, cher Monsieur, excusez-moi » (Aspasie) ; Couplets « Non, s’il faut que je vous explique » (Aspasie) ; Prière à Pallas « O Palace Athénée » (Mme Phidias) ;Air  « Ici-bas, c’est la loi commune » (Ardimédon) ; Ballet ; Valse « Ah ! tais-toi » (Mme Phidias, Ardimédon) ; « Le procédé vraiment nouveau » (les modèles, Le Pirée) et final II.

Acte III: Duo des souvenirs « D’abord Monsieur, vous m’enlaçâtes » (Mme Phidias, Ardimédon) ; Couplets « Bien chapeautée » (Aspasie) ; Chanson « Les jolis petits païens » (Phi-Phi) ; Quintette « Pour être heureux » ; Final III Ensemble « Non ces petits couchages »

— Fiche technique

Phi-Phi
Opérette légère en 3 actes d’ Albert Willemetz et Fabien Sollar ; musique de Henri Christiné. Création à Paris, théâtre des Bouffes-Parisiens le 12 novembre 1918. Avec :
Alice Cocéa (Aspasie), Pierrette Madd (Madame Phidias), Urban (Phi-Phi), Ferréal (Ardimédon), Dréan (Le Pirée)
Editions Salabert

Discographie

Intégrale

Colette Riedinger, Mireille, Max de Rieux, Bernard Alvi. Orchestre Edouard Bervilly
Carrère 67 763 (2 disques). Repris en 2 CD Universal/Accord 465886.2

Sélections

Gise Mey, Germaine Roger, Bourvil, Gaston Rey, Rogers. Orchestre Marcel Cariven
EMI C 057108 40

Andrée Grandjean, Marina Hotine, Jean Richard, Henri Genès, Dominique Tirmont. Orchestre Franck Pourcel
Pathé 30cm 320C023

Claudine Granger, Marina Florence, Jean-Philippe Laffont, Jean-Marie Joye. Orchestre Christian Lalune
TLP 1001

Colette Riedinger, Mireille, Max de Rieux, Bernard Alvi. Orch. Edouard Bervily
Sélection du Reader’s Digest CD 3159.8 (réédition Decca) (3 CD) (+ Dédé + [Yvain] Là-Haut)

Références

Vous retrouverez Phi-Phi dans « Opérette » n° 36, 48, 74, 110, 114, 158, 175, 189 & 203. Si l’un de ces articles vous intéresse, vous pouvez le consulter en allant sur notre page « Revue “Opérette” »

Dernière modification: 01/03/2024

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