Francis Lopez (1916-1995)
Après Méditerranée (17 décembre 1955), qui avait été un grand succès avec un Tino Rossi faisant de brillants débuts dans l’opérette, Maurice Lehmann assura sur la scène du Châtelet une reprise l’une de ses opérettes fétiche, Valses de Vienne.
La création suivante, Maria-Flora (19 décembre 1957), reçut un accueil mitigé et fut retirée de l’affiche après 206 représentations seulement. Maurice Lehmann (1) estimait que la musique de Henri Betti ne manquait pas d’intérêt mais que le livret, fait de bric et de broc au gré des caprices de Lilo, l’interprète féminine principale, était responsable de cette erreur de parcours. Valses de Vienne (31 mai 1958) remplit les salles et permit de faire la soudure avec Rose de Noël (20 décembre 1958), opérette fabriquée sur des musiques inédites de Franz Lehár. André Dassary et Nicole Broissin assurent le succès des représentations pendant une année entière.
Puis, le directeur du Châtelet commande à Francis Lopez et Raymond Vincy un nouvel ouvrage, Le Secret de Marco Polo, qui doit marquer la grande rentrée de Luis Mariano sur la scène où huit ans auparavant il avait obtenu un triomphe dans Le Chanteur de Mexico
Créé le 13 décembre 1959, Le Secret de Marco Polo, est retiré de l’affiche en octobre 1960. L’ouvrage n’obtient pas un succès comparable au Chanteur, et Maurice Lehmann affirme que Marco Polo, pour lequel il avait engagé des frais importants, fut pour lui une déception. Le directeur estime que Luis, rentré fatigué d’une tournée avec le cirque Pinder, n’était pas au mieux de sa forme ; il voit là une des raisons d’un résultat qu’il juge insuffisant.
Le spectacle se joua tout de même 368 fois mais des recettes sans doute globalement plus modestes peuvent également expliquer les propos de Lehmann. Le directeur du Châtelet estima alors que l’opérette à grand spectacle devait une nouvelle fois évoluer et qu’un renouvellement du style Lopez-Mariano s’imposait désormais. Ce qu’il fit avec La Polka des Lampions qu’il mit tranquillement au point tandis que L’Auberge du Cheval-Blanc (458 représentations) faisait son « tabac » habituel.
Quoiqu’il en soit, Le Secret de Marco Polo, malgré un livret plutôt confus, n’est pas un ouvrage inintéressant, ne serait-ce que par la musique de Francis Lopez toujours aussi agréable à l’oreille. Il est fort rarement repris de nos jours.
(1) « Trompe l’œil » par Maurice Lehmann (Pensée Moderne, 1971)
— L’argument
Acte I
Sur les bords du Fleuve Jaune, en 1287, arrive une jonque. Pepino, valet et ami d’enfance du vénitien Marco-Polo, qui jouit de la faveur de l’empereur Khoubilaï Khan, en descend et nous apprend que son maître a débarqué en amont pour rejoindre le Palais de Combaluc. Déception des méchants, Sing-Nan-Sing (chef du Grand Conseil des Vénérables) et Pah-Si-Fouh (premier conseiller) qui comptaient tendre un piège au navigateur.
Grande réception au Palais. Khoubilaï Khan annonce au baron Coga, qu’il accorde à son souverain, le roi Arghoun, la main de la belle princesse Mitsouti qui séjourne actuellement en Chine méridionale. Il la fera prochainement quérir et la confiera au dit Coga. Pour la bonne compréhension de ce qui va suivre – si c’est dans le domaine du possible – il y a lieu de signaler qu’au Palais vit une esclave, toutefois traitée avec noblesse, la princesse Lou-Kou-Song, fille d’un roi jadis vaincu par Khoubilaï Kan.
Marco Polo, absent depuis deux ans fait son entrée et apporte au souverain de splendides diamants. Il reçoit une terre en récompense, mais notre héros souhaite revoir son pays natal. Le Khan lui demande d’effectuer auparavant une dernière mission : il devra ramener la Princesse Mitsouti à Combaluc. Quelques jours plus tard, Marco Polo se rend en Chine méridionale sans savoir pourquoi il a l’ordre d’aller chercher la princesse Mitsouti. Bien entendu, dès leur première rencontre le Vénitien tombe sous le charme de la jeune fille auquel il n’est pas indifférent… Plus tard encore, retour à Combaluc. Grande fête Blanche, qui se termine par plusieurs coups de théâtre : Marco Polo apprend que Mitsouti est destinée à Arghoun et Khoubilaï Khan que les hordes barbares de son ennemi Khaïdou ont envahi son empire.
Khoubilaï Khan met son armée en ordre de marche, Marco Polo obtient le commandement d’une unité de cavaliers, et le baron Coga est chargé d’emmener Mitsouti (et la princesse Lou-Kou-Song qui lui a été donnée comme esclave) à son maître le roi Arghoun
Acte II
Le baron Coga, la princesse et sa suite sont faits prisonniers par des rebelles qui espèrent obtenir une bonne rançon en échange de ces captifs. Oui, mais c’est sans compter sur Marco Polo qui arrive avec son escadron et délivre sa bien aimée sans trop s’inquiéter du sort du baron Coga. Mitsouti s’en étonne et Marco Polo lui annonce qu’il a fait le projet de l’enlever et de l’emmener à Venise. Oui, mais les fugitifs sont repris par les troupes de Khoubilaï Khan, vainqueur de ses ennemis. L’empereur ne décolère pas. Il confie la princesse à Coga et oblige Marco Polo à commander le bateau qui emmènera la fiancée au roi Arghoun. Et comme son navire sera encadré par douze autres bâtiments, il ne pourra tenter de s’échapper. En souvenir de ses services rendus, le Vénitien pourra ensuite rejoindre sa patrie.
Lors d’une escale, on apprend la mort du roi Arghoun. La joie des amoureux est de courte durée car il est prévu dans ce cas, que c’est le fils du défunt, Kachan, qui doit épouser Mitsouti. Lors de la cérémonie de présentation, Lou-Kou-Song se subsitue à Mitsouti, avec la complicité plus ou moins volontaire de Coga. Marco Polo est autorisé à rejoindre son pays avec la fausse Lou-Kou-Song et ses amis.
Vous n’ignorez plus rien du « Secret de Marco Polo ».
Jean-Claude Fournier
— La partition
Acte I : Ouverture – Chœur d’entrée « Sur le fleuve jaune » – « Ah ! les Hinhous !! » (Pepino) – Chœur des Vénérables – Ballet des esclaves – Entrée et chanson de Marco Polo – Duetto-Tarentella (Pepino- Lou-Kou-Song) – Chant de Mitsouti – Le joli voyage (Marco Polo et Mitsouti) – Chœur « La cloche a sonné » – Grand ballet de la Fête Blanche – « Belle » (Marco Polo) – Chœur des Cavaliers, chant de Marco Polo et chœur final.
Acte II : Introduction orchestrale – Complainte de Mitsouti « Nul ne saura jamais » – Dou Boulargou- Lou-Kou-Song « Qhand on est chinoise » – Chanson de Marco Polo « Viens en Italie » – Quatuor « Mais quand du camp… » (Marco Polo, Mitsouti, Boulargou, Lou-Kou-Song) – Chœur « Sous les cerisiers en fleur » – « Au bout du monde » (Marco Polo » – Duo Pepino-Boulargou « La java des moustiques – Duo des adieux (Marco Polo- Mitsouti) – Chœur « Dans les jardins persans » – Final II
— Fiche technique
Le Secret de Marco Polo
Opérette à grand spectacle en 2 actes et 17 tableaux. Musique de Francis Lopez, livret de Raymond Vincy.
Création au théâtre du Châtelet à Paris, le 13 décembre 1959. Chorégraphie de Louis Orlandi, direction musicale de Félix Nuvolone, arrangements musicaux de Paul Bonneau, maquettes des décors et costumes de Raymond Fost, mise en scène de Maurice Lehmann, avec :
Janine Ervil (Mitsouti), Rosine Brèdy (Lou-Kou-Song), Claude Daltys (Boulargou), Luis Mariano (Marco Polo), Pieriac (Pepino), Serge Clin (Sing-Nan-Sing), René Novan (Pah-si-Fou), Robert Pizani (Koubilaï Khan), Sam-Max (baron Coga), Félix Esteban (le prince Kachan).
— Discographie
Sélections
Janine Ervil, Rosine Bredy, Luis Mariano, Claude Daltys. Orch. Paul Bonneau, Jacques-Henri Rys.
EMI FDLP 1090 (1 V) (25 cm)
Luis Mariano
EMI C 062 10 403 (1 V)( 1 face). Au verso : Violettes Impériales et La Cancion del Amor Mio.
Luis Mariano
Readers Digest 69 798 (1 V)( 1 face). Au verso : La P’tite Lily
Des extraits du « Secret de Marco Polo » sont vraisemblablement disponibles en CD chez Emi dans le cadre de rééditions « Mariano » intervenues récemment.
— Références
Vous retrouverez Le Secret de Marco Polo dans « Opérette » n° 81, 95, 155 & 171. Si l’un de ces articles vous intéresse, vous pouvez le consulter en allant sur notre page « Revue “Opérette” »
Dernière modification: 08/03/2024