Le Comte de Luxembourg

Le Comte de Luxembourg

Franz Lehár  (1870-1948)

 

1909 : La Veuve Joyeuse ; 1910 : Rêve de Valse ; 1912 : Le Comte de Luxembourg ; un beau palmarès à Paris pour l’Apollo qui collectionne les réussites. Son très avisé directeur, Alphonse Frank, ne s’inquiète pas du succès assez mitigé remporté par le dernier titre quelques mois plus tôt dans le cadre de la saison viennoise du Vaudeville ; il sait, dans son théâtre (situé rue de Clichy), inverser l’accueil du public. Il commence par charger les célèbres De Flers et De Caillavet d’écrire une version française de l’opérette jouée jusque-là en allemand, en ciblant au plus près le goût dominant de l’époque.
Franz Lehár vient en personne à Paris réviser sa partition et l’agrémenter d’un nouveau ballet pour l’acte II ; la presse lui ouvre ses colonnes ; le compositeur dit tout le bien qu’il pense des créations françaises de ses ouvrages, de l’Apollo, de la capitale… Décors, chœurs, orchestre important, rien n’est laissé au hasard. Pour la distribution, on concocte un savant dosage de valeurs sûres et de nouveaux noms : Henri Defreyn, qui avait chanté Danilo et Fonségur, est Fernand ; Félix Galipaux, le Popoff de La Veuve Joyeuse, joue le Grand Duc Basil « de façon à mettre toute la salle en joie » (Paul Souday) ; le public aime sa diction percutante, son exubérance. C’est Brigitte Régent qui crée le rôle de Suzanne ; d’après Robert Brussel, elle y fait « les plus heureux débuts » : « la voix est fraîche, joliment nuancée, d’un timbre très pur ; elle joue avec beaucoup de grâce et d’esprit ». Fernand Frey (Brissard), Paul Bert (Pawlow) et Angèle Gril (Juliette) complètent une distribution somme toute assez réduite.

Le Comte de Luxembourg sera souvent repris à Paris dans l’entre-deux-guerres, non dans les salles les plus cotées, mais dans ce qu’il faut bien appeler les théâtres de quartier et qui ont pour nom : Zénith, Théâtre lyrique du XVIe arrondissement, Théâtre Montparnasse, Bataclan, Théâtre des Gobelins, Nouveau théâtre de Vaugirard, Trianon-Lyrique, Théâtre Moncey… La programmation étant très variée dans chacune de ces salles, on se limite chaque année à une courte série de représentations de la même opérette (en général une semaine) ; mais le spectacle est donné dans de bonnes conditions, avec des distributions qui font souvent appel à des chanteurs connus. Des artistes qui triompheront dans le rôle de Suzanne, on retiendra Germaine Revel, Yvonne Barreau, Claire Sigall, Simone Harriett, R. Nivel, Raymonde Sylvane, Maguy Parny, Jany Leva, Mme Balazy, et même Mary Viard de l’Opéra-Comique au Trianon-Lyrique. Parmi les nombreux artistes à jouer Fernand, il faut citer Reda-Caire, Jean Suzan, Jean Farrès, Mazzanti, R.-M. Bourdeaux, Fréjaville, Budeau, Manzoni, Parenti ; un Basil qui revient souvent : Vincent Christian (1)

Si la Veuve joyeuse et Le Pays du sourire continuent à se maintenir en France au box-office de l’opérette, il n’en est pas de même pour Le Comte de Luxembourg qui paraît fort oublié de nos jours. On citera toutefois la reprise de l’ouvrage par le théâtre de l’Odéon de Marseille en mars 2001 (2 représentations)

(1) Extrait d’un article de Didier Roumilhac (« Opérette » n°99)

L’argument

Acte I :  

Fernand, Comte de Luxembourg, gentilhomme complètement ruiné, habite avec son ami Brissard, jeune peintre bohème, un atelier où l’on rencontre Juliette, modèle de ce dernier. Le Grand Duc Basilovitch propose à Fernand les cent mille francs qui lui feraient grand besoin en échange du « service » suivant : le Grand Duc, qui est épris d’une cantatrice française, Suzanne Didier, ne peut l’épouser, son rang lui interdisant cette mésalliance : il a donc l’idée de lui faire contracter un mariage avec un personnage titré qui, trois mois plus tard, divorcera, laissant libre la jeune femme avec qui il pourra enfin s’unir. Voilà le marché proposé au comte qui ne peut guère refuser. Le mariage a lieu devant le consul, le paravent qui cache les époux l’un à l’autre réduisant la cérémonie à une simple formalité ; en effet Fernand part en voyage avec Brissard, sans même avoir vu la femme qu’il a épousée.

Acte II

Suzanne Didier réunit tous ses amis à l’occasion de sa soirée d’adieux au théâtre ; le Grand Duc est là, plus amoureux que jamais. Fernand y paraît, sous prétexte de rapporter le gant que Suzanne a laissé tomber à la sortie de l’Opéra-Comique. Brissard, qui accompagne son ami, retrouve à la fête Juliette avec qui il se réconcilie.
Suzanne et Fernand ignorent qu’ils sont mariés. Luxembourg lui avoue la forte impression qu’il a ressentie en la voyant sur scène et lui déclare sa flamme. Suzanne n’est pas insensible à ce sentiment. Le Grand Duc Basil surprend les deux jeunes gens et pour les séparer à jamais annonce à l’assemblée son prochain mariage avec Suzanne. Cette dernière apprend que Luxembourg est l’inconnu qui avait consenti à vendre son nom pour toucher la prime de cent mille francs.

Acte III

Brissard a réintégré son domicile. Fernand se désole de voir Suzanne lui échapper ; celle-ci, la colère passée, n’aspire qu’à devenir réellement sa femme, s’il n’y avait le Grand Duc et les cent mille francs. Basil met en demeure Luxembourg de lui rendre ou sa femme ou la somme qu’il a reçue. Le comte est bien incapable de rendre les cent mille francs. Heureusement, Brissard se fait passé pour mort et sa prétendue disparition donne à ses œuvres une valeur imprévue. Fernand peut rembourser le Grand Duc avec l’argent de son ami, et Suzanne restera Comtesse de Luxembourg.

La partition

Acte 1 : Chœur et entrée de Fernand « J’ai pour aïeul » ; « J’ai le cœur plein » (Basil) ; Ensemble « Un chèque de cent mille francs » ; « Je vais être mariée » (Suzanne) ; « Vous serez altesse royale » (Suzanne et Basil) ; « Comtesse, je mets à vos genoux (Fernand, Suzanne) ; Ensemble « Bonheur, n’est-ce pas toi » (Fernand), « Vive la folie » et final I

Acte 2 : Chœur des invités « Vive Suzanne Didier » et Suzanne ; Couplets du Rootsi-Pootsi » (Basil, Juliette) ; « Pour ce petit gant de femme » (Fernand) ; « Puisqu’il vous plaît » (Juliette et Brissard) ; « Vous perdez la tête baron » (Fernand, Suzanne) ; « Je vous aime à jamais » (Fernand, Suzanne) ; Ensemble « Chers Messieurs et chères Dames » et final II

Acte 3 : « L’amour, ah ! que c’est charmant » (Juliette, Brissard, Fernand) ; « C’était par un beau jour bleu » (Brissard, Suzanne) ; « Je dois vous en vouloir » (Suzanne, Fernand) ; Duo russe (Juliette, Brissard) ; Final « En avant, vive la folie »

Fiche technique

Le Comte de Luxembourg (Der Graf von Luxemburg)
Opérette en 3 actes de Alfred-Maria Wilner et Robert Bodansky. Musique de Franz Lehár. 1ère représentation à Vienne, théâtre An der Wien, le 12 novembre 1909.
Version française de Gaston Arman de Caillavet, Robert de Flers et Jean Bénédict, créée à Paris, théâtre de l’Apollo le 13 mars 1912 avec :
Brigitte Régent (Suzanne), Angèle Gril (Juliette), Henri Defreyn (Fernand de Luxembourg), Fernand Frey (Brissard), Félix Galipaux (Basil).
Editions Max Eschig

Discographie

Sélections :

Colette Riedinger, Annick Baugé, Gabriel Bacquier, André Balbon, Robert Destain ; direction musicale, Richard Blareau (1 vinyl 30cm Decca 215836).
Universal Accord 4769992 (+ Frasquita+La Veuve Joyeuse) (2CD) & Decca 215836 (1 V) ou ACL 920 (1 V)

Liliane Berton, Odette Lost, Michel Dens, Michel Roux ; direction musicale, Félix Nuvolone
1 vinyl Emi 30cm C051-12193.

Paulette Merval, Rolande Riffaud, Marcel Merkès, Jean Louis Simon ; direction musicale, Jacques Météhen
1 vinyl Odéon XOC182 1 face, 2ème face, Princesse Czardas.

Josette Favey, Willy Clément, Geori Boué, Henri Bédex ; direction musicale, Raymond Chevreux
1 vinyl Capri 30cm 1 face 655027, 2ème face, Paganini.

Christiane Stutzmann, Alain Vanzo, Lina Dachary. Orch. Adolphe Sibert
Studio SM (1CD) (+ Le Pays du Sourire)

DVD :

Michael Suttner, Gesa Hoppe, Harald Serafin, Marika Lichter, Marko Kathol… Orch. Rudolf Bibl
(Der Graf von Luxemburg, en allemand ; sous-titres français) – Festival de Mörbisch
ORF VLMD 013 NTSC (1 DVD)  

Roger Desfossez, Nadine Fosse, Christian Asse, Dominique Tirmont, Henri Bedex, Jean Markovitch, Colette Riedinger. Orch. Georges Derveaux
RTF 1958

—Références

Vous retrouverez Le Comte de Luxembourg dans « Opérette » n° 99, 119, 173, & 187. Si l’un de ces articles vous intéresse, vous pouvez le consulter en allant sur notre page « Revue “Opérette” »

Dernière modification: 27/02/2024

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