Le Cœur et la main

Le Cœur et la main

Charles Lecocq (1832-1918)

 

Le nouvel opéra-comique que Lecocq présentait en cette soirée du 19 octobre 1882 au Théâtre des Nouveautés succédait à une reprise de Fatinitza de Suppé et aux deux cents représentations du Jour et de la Nuit. Les spectateurs ne purent manquer de s’apercevoir que la nouvelle pièce, malgré le changement de librettiste, était la sœur de l’autre ; elles appartenaient à cette longue série d’ouvrages de Lecocq basés sur l’idée de la nuit de noces contrariée, un au moins des époux n’étant pas celui que l’on croit être. L’originalité de ces ouvrages était, qu’ils commençaient là où d’autres finissent : par un mariage. Ceci avait fourni à Lecocq des livrets à succès depuis dix ans : Giroflé Girofla (1874), La Petite Mariée (1875), La Marjolaine (1877) Le Petit Duc (1878), Le Grand Casimir (1879), le Jour et la Nuit (1881) pour n’en citer que quelques-uns, en étaient des exemples, plus ou moins fidèles au patron original ; même l’immortelle Fille Angot commençait, elle aussi, par des préparatifs de mariage.  

Il fallait donc se différencier du Jour et la Nuit, tout en faisant de l’aussi bonne musique, si possible. Lecocq se multiplia, donnant à Micaëla (rôle écrit pour la ravissante Mme Vaillant-Couturier) toute une série de délicieuses choses à chanter et réservant enfin pour cette fois le rôle de l’amoureux à un baryton, M. Vauthier, dont la voix, la prestance et la bonne humeur allaient faire merveille. Le principal rôle comique était tenu par l’amusant Berthelier, toujours présent et qui tirait du rôle du roi d’Aragon le. maximum possible – et même plus, affirma-t-on. Il y avait aussi Montaubry fils qui promettait beaucoup et la gracieuse Elise Clary.
Voici comment Lecocq jugeait cette œuvre :
« Jolie pièce dont les deux premiers actes sont les meilleurs. Le troisième ne m’a jamais satisfait… Le succès fut très grand, et madame Vaillant-Couturier, excellente chanteuse, très jolie femme, qui faisait son début dans l’opérette, y produisit un excellent effet. Tous les rôles étaient bien tenus, la pièce soigneusement montée, et je puis enregistrer cet ouvrage parmi mes plus francs succès. Malgré le chiffre élevé des recettes, le directeur des Nouveautés, pour des raisons administratives à lui connues, interrompit brusquement les représentations à la centième pour jouer une autre pièce ».

Sources : article de Robert Pourvoyeur et « Hervé-Lecocq » par Louis Schneider (Librairie Académique Perrin, 1924)

L’argument

L’action se passe dans une royauté imaginaire, à une période non précisée.

Acte I : Le parc royal

Micaëla, la fille du roi, doit épouser Don Gaëtan, Prince héritier d’une royauté voisine. Mariage de raison destiné à éviter la rupture d’un précaire équilibre européen. Excédée par l’étiquette, Micaëla s’échappe du palais chaque fois que possible pour rejoindre Joséfa, la jeune et jolie jardinière. Ce jour-là, le roi est en colère. Son futur gendre se soumet avec mauvaise volonté à cette union préfabriquée. Il aurait souhaité faire un mariage d’amour. Pour montrer sa mauvaise humeur, il échappe à la discrète surveillance dont il est l’objet. Le roi ordonne qu’il soit recherché et retrouvé dans les moindres délais.
Quelques instants plus tard Gaëtan sort de sa cachette et se présente devant Micaëla vêtue des habits de Joséfa, c’est-à-dire méconnaissable. La jeune princesse connaît l’identité de son compagnon, mais le jeune homme croit avoir à faire à une véritable jardinière. Et Micaëla plait beaucoup à Gaëtan. Et Gaëtan plait beaucoup à Micaëla. Le prince conte fleurette à la fausse Joséfa. Il avoue épouser la princesse par raison d’Etat. Il affirme qu’il ne la regardera pas une seule fois pendant toute la cérémonie. On entend du bruit. Gaëtan n’a que le temps de se déclarer à Micaëla. La fausse jardinière s’enfuit et le roi paraît, enchanté d’avoir retrouvé son futur gendre.

Acte II : Une grande salle du Palais royal

C’est le jour du mariage princier. Le matin même, Joséfa a épousé son amoureux Moralès. Fidèle à sa promesse, Gaëtan affecte de ne pas regarder Micaëla. La cérémonie se passe à peu près bien, le prince se contentant de mélanger les pages des allocutions qu’il prononce à l’intention des différents corps de métier. Il refuse toutefois de danser avec la princesse.
Les époux sont reconduits dans leurs appartements. Gaëtan réapparaît et tente de sortir du palais. Mais le roi a fait garder toutes les issues. Il ne peut s’échapper. De service au palais, Joséfa ne peut rejoindre son époux. Celui-ci vient vers elle et s’accorde quelques privautés. Entendant du bruit, il entraîne sa jeune femme dans la chambre nuptiale destinée au couple princier. Le roi, toujours inquiet, se demande si le mariage est bien en train de se consommer. Il entend le bruit des baisers qu’échangent Moralès et Joséfa. Rassuré, il se retire.
Gaëtan revient et trouve Micaëla déguisée en jardinière. Un baiser, deux baisers et la jeune femme ne se fait pas prier pour se retirer avec son compagnon dans sa propre chambre de jeune fille.

Acte III : Un camp, le quartier général de Gaëtan

Pendant la période des grandes manœuvres militaires, Micaëla et sa suite se sont retirées dans un couvent voisin. Régulièrement, la jeune femme vient rejoindre mystérieusement son époux qui croit toujours poursuivre une liaison avec Joséfa. Le roi vient apprendre une bonne nouvelle à son gendre. Il va être grand-père. Gaëtan pense d’abord que le médecin de la cour s’est trompé. Sur ces entrefaites, Moralès vient s’excuser d’avoir, le soir des noces, utilisé la chambre nuptiale a des fins personnelles. Gaëtan croit maintenant connaître le père du futur prince héritier. Mais tout s’arrangera bientôt avec l’arrivée de Micaëla, qui, cette fois, se fera connaître à son époux sous sa véritable identité.

La partition

Acte I :  Chœur « C’est demain le mariage », et couplets de Joséfa « Au mariage des Princesses » – Chœur des gardes « C’est nous les gardes du palais » – Chœur « C’est l’heure de la promenade » et mélodie de Micaëla « M’y voici, mais pourrai-je ? »- Couplets du Roi « Vlan ! J’ai perdu mon gendre » – « Au soldat, après la parade » (Morales) – Rondeau de Micaëla « Ah que de mal on a » – Ronde de Micaëla « Ma fille, c’est un mari » – Couplets de Gaëtan et duo « Par toi divine créature » – Final : Chœur des Bombardiers, couplets de Gaëtan « Je suis un prince un peu fantasque » et strette « on n’a jamais vu çà ».

Acte II: Chœur des mariées « La Princesse qui nous marie » – Chœur « Dans l’almanach de Gotha » – Ensemble « Il me regarde à peine », danse et Gaëtan « La chanson du casque » – Morceau d’ensemble « Bientôt à la cathédrale » et le roi « O Micaëla, ma chère » – Couplets de Micaëla « Au fond de l’alcôve blottie » – Duo Joséfa -Moralès « C’est-là leur chambre nuptiale » – Duo Micaëla-Gaëtan « Mon devoir ailleurs me rappelle » et chanson de Micaëla « Un soir, José le capitaine ».

Acte III : Chœur des soldats « Il a l’épaulette » – Couplets de Micaëla « Ah j’enviais les hirondelles »- Ensemble « Le parlementaire a sur les yeux un bandeau » – chœur « Ah! Sire, exaucez nos prières » et couplets du roi « Ne craignez rien, les belles filles » – Gaëtan « Ai-je bien le droit d’être si sévère » – Joséfa « Monsieur me croit infidèle » – Final III « Je suis Princesse et votre épouse ».

Fiche technique

Le coeur et la main
Opérette en 3 actes de Charles Nuitter et Alexandre Beaumont. Musique de Charles Lecocq. Création à Paris, théâtre des Nouveautés, le 19 octobre 1882. Avec :
Mmes Vaillant-Couturier (Micaëla), Elise Clary (Joséfa), Felcourt (Dona Scolastica), Morianne (Anita), Lucy-Jane (Pepa), Ducouret (Ascanio), Norette (Dolores), Varennes (Lazaro), Eymard (Mercédes) – MM Berthelier (le roi), Vauthier (Don Gaëtan), Scipion (Don Mosquitos), Montaubry (Moralès), Charvet (Baldomero), Lauret (un capitaine), Dubois (un lieutenant), Prosper (un soldat)
Éditions EPTC Chappell

Discographie

Intégrale

Lina Dachary, Claude Bergeret, Gaston Rey, Dominique Tirmont. Direction musicale, Marcel Cariven
Musidisc 201962 (2CD) (+ Pages de La Petite Mariée)

Références

Vous retrouverez Le cœur et la main dans « Opérette » n° 47 & 164. Si l’un de ces articles vous intéresse, vous pouvez le consulter en allant sur notre page « Revue “Opérette” »

Dernière modification: 27/02/2024

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