Ciboulette

Reynaldo Hahn (1874-1947)

 

1923. L’époque des « années folles ». Les compositeurs à la mode, comme Yvain et Christiné, sont influencés par les rythmes venus d’outre-atlantique, même si leur musique reste d’inspiration française : Dédé, Ta bouche et Là-Haut triomphent au théâtre. Reynaldo Hahn, qui n’a jamais encore écrit de « musique légère », cède aux sollicitations de Robert de Flers qui lui adresse un télégramme (Reynaldo est en voyage en Allemagne) : « Acceptez-vous de composer musique opérette traditionnelle, dans cadre Halles, comme Fille Angot ? » (1). Le musicien accepte d’autant plus qu’il apprécie fort modérément la vague d’américanisme qui déferle sur la France… Un défi à relever !
Et l’aventure commence. Tandis que de Croisset écrit le scénario, De Flers rime les couplets. Reynaldo Hahn grimace lorsqu’on lui propose de titre de Ciboulette, qu’il estime par trop vulgaire. Citronnette ? C’est pire. Allons va pour Ciboulette !
Le compositeur ne croit guère au succès de l’opérette, même si la distribution est particulièrement bien venue : Edmée Favart et Jean Périer, entourés d’Henri Defreyn, éternel jeune premier, Pauley, Jeanne Perriat, Madeleine Guitty et René Koval. Pour la petite histoire, citons également Pierre Larquey qui tenait le modeste rôle d’un huissier.
Le théâtre des Variétés, dirigé par Max Maurey, reçoit l’ouvrage qui avait été initialement prévu pour le théâtre de Paris.
Reynaldo Hahn, le soir de la première, préfère se rendre au cinéma. Puis, après le film, il se dirige à tout hasard vers les Variétés. Un attroupement s’est formé à la sortie du théâtre. De Croisset le reconnaît et l’entraîne sur le plateau où il est ovationné. Le public a apprécié la musique faite de sensibilité, de grâce et d’esprit du compositeur ; le final du Muguet et Nous avons fait un beau voyage ont été particulièrement applaudis.
Le lendemain,  la presse est élogieuse si l’on excepte quelques irréductibles grincheux.

En dehors de la province où l’ouvrage fit bien entendu carrière, on citera quelques reprises remarquées dans la capitale : en 1926 au théâtre Marigny, la distribution, partiellement renouvelée, ne manque pas d’allure : André Baugé, Edmée Favart, Danielle Brégis, Madeleine Guitty, Henri Defreyn puis Victor Pujol. À la Gaîté-Lyrique en 1931, René Camia est la partenaire d’Aquistapace. La création salle Favart a lieu le 13 mars 1953 avec Roger Bourdin et Geori Boué entourés de Raymond Amade et Lily Grandval. L’occasion, pour les deux têtes d’affiche, d’enregistrer chez Pathé, une sélection de ce chef d’œuvre du répertoire.
On citera enfin, en 1975, la série de représentations données salle Favart avec Nicole Broissin, Henri Gui, André Battedou, Odette Laure, Maïté Barère. Direction musicale, François Rauber ; mise en scène, Raymond Vogel.

(1) Source : « Reynaldo Hahn, le musicien de la Belle Epoque » par Bernard Gavoty (Buchet/ Chastel, 1976). De nombreuses informations contenues dans cette présentation ont été puisées dans cet ouvrage.

L’argument

L’action se passe à Paris et à Aubervilliers en 1867

Acte I

1er tableau : Le cabaret du chien qui fume2ème tableau : Le carreau des Halles
La jeune Ciboulette est maraîchère aux Halles. Sa voisine sur le carreau, la mère Pingret lui prophétise un beau mariage. Mais pour que la prédiction se réalise, il lui faudra auparavant découvrir son futur époux sous un chou, blanchir la perruque rousse d’une rivale et recevoir un billet de faire-part sur un tambour basque.
Antonin de Mourmelon, jeune et riche benêt, qui vient d’être plaqué par sa maîtresse, la cocotte Zénobie, au profit de l’avantageux capitaine Roger, promène son désespoir dans les Halles où il fait la connaissance de Ciboulette.Les deux jeunes gens sympathisent, mais doivent bientôt se quitter.

Acte II

3ème tableau : A Aubervilliers, chez le père Grenu
Antonin s’endort sous un tas de choux dans la carriole de Ciboulette qui se rend à Aubervilliers chez son oncle Grenu, accompagnée de Duparquet, qui n’est autre que le Rodolphe vieilli de « La vie de Bohème ». À la ferme du père Grenu, Ciboulette, enchantée, découvre Antonin. Première prophétie réalisée. Les deux jeunes gens se plaisent de plus en plus : Ciboulette est déjà amoureuse ; Antonin hésite encore entre le souvenir de Zénobie et le charme de la petite maraîchère.
Zénobie arrive à la ferme en joyeuse compagnie. Ciboulette enferme Antonin dans la cave afin qu’il ne soit pas tenté de courir après son ancienne maîtresse. Bien entendu, Ciboulette et Zénobie se disputent et la deuxième prophétie est bientôt remplie : la rousse cocotte reçoit sur la tête un panier rempli de farine. Un peu plus tard, Ciboulette raconte l’incident à Antonin qui lui reproche vertement sa façon d’agir. Échanges verbaux orageux entre les « deux futurs époux ». Le jeune benêt, persuadé que Zénobie l’aime toujours, s’en va la retrouver. Ciboulette est aussi furieuse que désespérée.
Mais Duparquet-Rodolphe est là. Il a décidé d’aider ces deux enfants. Ayant remarqué la jolie voix et la fantaisie de la jeune fille, il va tenter de lui faire conquérir Paris sous le pseudonyme de Conchita Ciboulero.

Acte III

4ème tableau : une soirée chez Olivier Métra
Duparquet présente la jeune maraîchère à Olivier Métra, le célèbre compositeur de valses et voici notre héroïne bien partie pour devenir une grande vedette. Tous les personnages se retrouvent à une soirée donnée par Olivier Métra, à laquelle Ciboulette apparaît masquée. Antonin, invité par Duparquet, promène sa tristesse. Ayant définitivement rompu avec Zénobie, il ne pense qu’à Ciboulette dont il a perdu la trace ; il décide d’en finir avec la vie. Aidé par Duparquet, il rédige son propre billet de décès qui sera remis, au cours de la soirée, sur un tambour basque à Conchita-Ciboulette. Antonin finit par reconnaître Ciboulette. La troisième condition étant remplie, les deux amoureux peuvent sans crainte tomber dans les bras l’un de l’autre.

La partition

Acte I :
Introduction, ensemble « Nous sommes six hussards » et  Roger « Mes amis, ma joie est profonde » ; Ensemble « Est-ce Monsieur Thiers ? » ; « Bien des jeunes gens ont vingt ans » (Duparquet) ; « Depuis un mois » (Zénobie, Roger, Duparquet) ; « Roger a fait votre conquête » (Antonin), ensemble, chœur ; Chœur, Auguste et Françoise « Nous sommes les bons maraîchers » ; Entrée de Ciboulette « Dans une charrette, qu’on est bien à 20 ans », « Moi, j’m’appelle Ciboulette » (Ciboulette) ; Ensemble « Oh mon Dieu ! dans ses yeux que de larmes ! » ; « C’était pas la peine de se rencontrer » (Antonin, Ciboulette) ; Ensemble, Ciboulette « Il court, il court le muguet » et final I

Acte II :
Introduction et chœur « C’est le doux silence des champs » ; « Nous avons fait un beau voyage » (Ciboulette, Duparquet) ; « C’est sa banlieue » (Ciboulette) ; Chœur des fiancés ; « Ah ! si vous étiez Nicolas » (Ciboulette, Antonin) ; Roger et les officiers, chœur, ensemble et Ciboulette « Moi j’m’en fous » ; « C’est tout ce qui me reste d’elle » (Duparquet) ; Chœur et final II

Acte III :
« J’ai 28 ans » (Antonin) ; « Mon amour daigne te permettre » (Duparquet, Antonin) ; Chœur, Ciboulette « Amour qui passe », dénouement et final III

Fiche technique

Ciboulette
Opérette en 3 actes et 4 tableaux. Livret : Robert de Flers et Francis de Croisset. Musique de Reynaldo Hahn.
Création : Paris, théâtre des Variétés, le 7 avril 1923 avec Jean Périer (Duparquet), Edmée Favart (Ciboulette), Henry Defreyn (Antonin), Jeanne Perriat (Zénobie), Madeleine Guitty (la mère Pingret), Jean Calain (le capitaine Roger), Pauley (le père Grenu), René Koval (Olivier Métra), Pierre Larquey (un huissier), Luce Fabiole (la Castiglione), Jeanne Loury (la mère Grenu). Orchestre sous la direction de Paul Letombe.
Editions Salabert

Discographie

ciboullette 1
Mady Mesplé (© FR3 Toulouse)

Intégrale

Mady Mesplé, Colette Alliot-Lugaz, José Van Dam, Nicolaï Gedda, François le Roux. Geori Boué, Michel Hamel, Madeleine Drouot, Roger Bourdin, Lucien Lovano, Camille Maurane. Orch. Jules Gressier
Cantus Classics 501745 (2CD)

Sélections

Andrée Grandjean, Françoise Ogeas, Willy Clément, Michel Hamel, Jean-Christophe Benoît. Dir. Paul Bonneau
Ducretet 300 VO 94.  Repris en un double CD EPM/Emi 568 286 2 comportant également « Mozart » de Hahn.

Roger Bourdin, Geori Boué. Orch. Marcel Cariven
EMI C 057 12089

Edmée Favart, Henri Defreyn.
7 extraits de Ciboulette (un coffret EPM 982482 4CD « L’opérette française par ses créateurs » comprenant des extraits de 9 opérettes de la période 1921-1934) (16 mn)

Mady Mesplé, Colette Alliot-Lugaz, José Van Dam, Nicolaï Gedda, François le Roux. Orch. Cyril Diederich
Sélection du Reader’s Digest CD 3159.5 (extraits intégrale EMI) (3 CD) (+ Les Saltimbanques [Ganne] + Véronique [Messager] ) 

Références

Vous retrouverez Ciboulette dans « Opérette » n° 58, 101, 102, 103, 148, 166, 167,  171, 176, 208, Si l’un de ces articles vous intéresse, vous pouvez le consulter en allant sur notre page « Revue “Opérette” »

Dernière modification: 27/02/2024

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