Chanson gitane

Maurice Yvain (1891-1965)

 

Carthacalha, reine des gitans (1941) est le titre d’un film de Léon Matrot, interprété par Viviane Romance, Georges Flamant et Roger Duchesne, pour lequel Maurice Yvain a composé la chanson « Sur la route qui va ».
Quelques années plus tard, Louis Poterat, auteur des paroles de cette chanson, a l’idée d’une opérette dont le motif principal serait justement « Sur la route qui va ». Maurice Yvain donne son accord, on fait appel au librettiste André Mouézy-Eon et, la pièce terminée, les auteurs la présentent à Henri Montjoye, directeur de la Gaîté-Lyrique. Dans son livre de souvenirs (1), Maurice Yvain écrit :
« Celui-ci, sous son véritable nom, Barbero, avait été un de mes interprètes au Châtelet dans Au Soleil du Mexique. Son nouveau patronyme lui venait de la Résistance, dont il avait été un des héros. Il reçut l’œuvre d’enthousiasme, la monta superbement et nous obtînmes un succès incontesté… »

Une distribution de choix avait été réunie. André Dassary, alors âgé de 34 ans, s’était déjà fait remarquer en opérette. Après des débuts dans L’Auberge qui chante (Gaîté-Lyrique, 1941), il avait été engagé au Châtelet dans Valses de France, enfin à l’Ambigu dans L’Ingénue de Londres (1946). Il s’imposa définitivement avec Chanson Gitane (13 décembre 1946) qu’il chanta, après Paris, des milliers de fois au cours de sa longue carrière. À cette époque où l’interprète principal était invité à bisser son air de bravoure, il n’était pas rare que Dassary interprète cinq ou six fois le célèbre « L’amour qu’un jour tu m’as donné ». Auprès de lui, on remarquait Mag Walter (Mitidika), Rita Mazzoni (la duchesse de Berry), Marina Hotine (Zita), Armand Mestral (Zarifi) qui triomphait chaque soir dans le non moins célèbre « Jalousie », Rogers (Jasmin) et Léo Bardollet (Nicolas).

Après une année de succès, Chanson Gitane céda la place à Andalousie et s’en alla à la conquête de la France profonde et de la Belgique. Reprise deux fois à la Gaîté-Lyrique par André Dassary (1950 et 1954), Chanson Gitane est restée longtemps au répertoire des scènes de province.
Aujourd’hui, cette opérette qui bénéficie pourtant de l’une des meilleures partitions de Maurice Yvain et d’un livret bien construit n’est plus guère montée. Sans raison apparente.

(1) Ma Belle Opérette (La Table Ronde, 1962)

— L’argument

L’action se déroule en 1826.

Acte I

La comtesse des Gemmeries donne une grande réception dans son château angevin en l’honneur de la Duchesse de Berry. La vieille dame est contrariée car Hubert, son fils aîné arrive en retard. Cet Hubert des Gemmeries est d’ailleurs un personnage original ; jeune, beau garçon, sympathique, il refuse de se marier et préfère vivre en solitaire dans son château provincial, partageant son temps entre la chasse au gibier et la chasse aux braconniers.
La duchesse de Berry, frappée par l’aspect sauvage du jeune homme, l’invite à une fête qu’elle doit donner prochainement. Hubert ne peut opposer de refus à une si grande dame.
Pour l’heure, son garde-chasse vient l’avertir de la présence près du château, d’un cirque ambulant, présence qui coïncide avec la disparition de volailles dans les fermes voisines. Abandonnant les invités, Hubert se rend près des roulottes et invite les bohémiens à plier bagage sans tarder. Zarifi, le chef du campement, nie les vols, mais Mitidika, la plus belle des zingaras, vient se camper devant Hubert et avoue que ce sont bien ses amis qui ont dérobé les poules. La crânerie de Mitidika impressionne le comte qui se radoucit.
Hubert revient quelques heures plus tard et fait une cour pressante à la belle. Mais tout sépare un gentilhomme de haut rang d’une petite bohémienne. Troublée cependant, la gitane lui accorde un baiser, et s’enfuit en lui demandant de l’oublier. Le lendemain matin, les roulottes ont disparu.
Hubert la cherche activement. Il finit par rejoindre le cirque Zarifi à Angers. Zarifi, qui aime Mitidika, est furieux de la présence du comte. Un incident violent éclate entre les deux hommes. Plus tard, pendant la représentation, Hubert accepte de tenir le rôle de cible vivante. Mais Mitidika, persuadée que Zarifi veut tuer le jeune homme, s’interpose, avouant ainsi son amour pour Hubert. À la suite de cet aveu, le comte persuade Mitidika de le suivre. Les deux jeunes gens se marient malgré l’opposition de la comtesse des Gemmeries.

Acte II

La comtesse des Gemmeries accepte mal cette mésalliance. Mitidika, protégée par l’amour de son mari, prend tout d’abord patience. Au cours de la fête organisée par la duchesse de Berry, un esclandre éclate entre Mitidika et sa belle-mère. La zingara s’enfuit et rejoint sa tribu. Cette même nuit, la rivière de diamants de la comtesse des Gemmeries disparaît. Cette dernière n’hésite pas à accuser Mitidika, malgré les protestations d’Hubert. Une nouvelle fois le jeune homme part à la recherche de celle qu’il aime.
C’est à Dieppe que nous retrouvons tous les héros de cette aventure. La duchesse de Berry s’apprête à faire voile vers l’Italie. Mitidika est arrêtée par la police, mais la vérité éclate bientôt. C’est Philippe, le frère d’Hubert, qui avait volé le collier pour faire face à des dettes de jeu criardes.
La duchesse de Berry comprend que Mitidika et Hubert risquent à tout moment d’être à nouveau séparés à cause des préjugés de race et de caste. Elle met donc à leur disposition un grand domaine en Italie, où ils pourront vivre indépendants. C’est la joie au cœur que Mitidika et Hubert s’embarquent…

— La partition

Acte I : Introduction et chœur d’entrée ; Duo Jasmin-Jeannette « Quand on attend trop longtemps » ; Air d’entrée de la duchesse « Les plaisirs, les jeux et les ris » : Air d’entrée d’Hubert « Tant que le printemps » ; Duo Jasmin-Zita « Caillou noir et caillou blanc » ; Air d’entrée de Mitidika « La Zingarella » ; Chœur des gitans ; Hubert « Enchantement d’un beau soir d’été » ; Duo Hubert-Mitidika ; Jasmin « Je fais le clown » ; Zarifi « Malheur à toi » ; Ballet gitan ; Final I

Acte II : Zarifi « Jalousie » ; Trio Mitidika, Hubert, Zita « Au pas du petit poney » ; Quatuor « Mon papa » (Zita, Jasmin, Jeannette, Nicolas) ; La duchesse « La valse de Paris » ; Mitidika et Zita « L’Aragonaise » ; Mitidika « Sur la route qui va » ; Hubert « L’amour qu’un jour tu m’as donné » ; Final II

Fiche technique

Chanson Gitane
Opérette en 2 actes et 13 tableaux, livret d’André Mouézy-Eon, couplets de Louis Poterat, musique de Maurice Yvain. Création à Paris, Théâtre de la Gaîté Lyrique, le 13 décembre 1946. Avec :
Mag Walter (Mitidika), Rita Mazzoni (la duchesse de Berry), Marina Hotine (Zita), Raymonde Astor (Jeannette), Jane Montange (la comtesse), André Dassary (Hubert), Rogers (Jasmin), Armand Mestral (Zarifi), Léo Bardollet (Nicolas), Henri Despuech, Robert Destain, Métairie. Direction musicale, Jef de Murel ; mise en scène de Henri Montjoye ; décors de Pellegry et Fost, danses réglées par Corbay.
Editions Chappell

— Discographie

Sélection

Maria Murano, Liliane Berton, André Dassary, Rogers, Gise Mey. Orch. Marcel Cariven
EPM/Emi (2CD) (+ Eugène Le Mystérieux [Damase] + Casanova [Wall-Berg]) & EMI C 05712197 (1 V)

Références

Vous retrouverez Chanson Gitane dans « Opérette » n° 65 & 176. Si l’un de ces articles vous intéresse, vous pouvez le consulter en allant sur notre page « Revue “Opérette” »

Dernière modification: 27/02/2024

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