Bernard Sinclair (1935-2015) baryton-martin

Bernard Sinclair (1935-2015) baryton-martin

Personnalité brillante aux multiples facettes : chanteur, auteur, pianiste, compositeur, metteur en scène, fin comédien, Bernard Sinclair est né en 1935 à Marcq-en-Baroeul, dans le Nord. Après avoir débuté dans la chanson alors qu’il était étudiant en médecine, il se tourne rapidement vers une carrière lyrique, sur les conseils d’Elie Delfosse qui devait devenir, par la suite, directeur de l’Opéra de Nancy, puis de l’Opéra du Nord. Brûlant les étapes, il accède immédiatement aux premiers rôles d’opéra-comique et d’opérette dans les théâtres de province et d’expression française. P. Lafaille, rendant compte d’une représentation de Princesse Czardas au Théâtre Sébastopol de Lille, écrit dans la revue « L’Entracte” : “Quel chemin parcouru vers la consécration depuis ce soir où, à Roubaix, Bernard Sinclair se lança, encore étudiant, dans le grand bain sous la faluche du joyeux Schaunard de « La Bohème », puis sous la bure plus austère du Moine musicien du « Jongleur de Notre-Dame » !… Il a franchi les étapes aussi allégrement que son aigu soutient les tessitures les plus ardues. C’est vibrant, passionné et… clair comme son pseudonyme”.

Il est vrai que ce séduisant baryton-martin a reçu bien des dons en partage : une voix au timbre plein de charme et à l’aigu généreux et éclatant, une musicalité parfaite, un physique de jeune premier et une élégance naturelle qui, joints à son talent de comédien, en font un interprète idéal de l’opérette classique française, de l’opérette viennoise et de certains opéras. En témoigne cette critique parue dans le journal « La France” de Bordeaux, sous la plume de Roger Galy, en 1970, sous le titre  « Bernard Sinclair, un éblouissant Mârouf » : « Bernard Sinclair compose son personnage avec beaucoup de finesse. Il est le malheureux Mârouf et Mârouf l’étonné. Il est le Mârouf prenant peu à peu de l’assurance et puis le Mârouf radieux comblé par les dieux et l’amour. Que de gentillesse, de simplicité, d’intelligence en un mot. Et jamais, semble-t-il, sa voix n’a été plus valeureuse et mieux conduite tant dans le médium que dans l’aigu. On songe au mot perfection… eh oui… c’est ainsi ». Le même critique, à propos de son interprétation de Schubert dans Chanson d’amour, saluait « Un Sinclair des très grands jours qui atteint la perfection dans ce rôle.Il est certes remarquablement grimé, mais quelle science du geste, quelle intelligence, quelle émotion ! Un authentique Schubert quoi, myope, passant dans la vie comme dans un rêve. Bernard Sinclair n’est donc pas seulement le jeune premier des aventures viennoises, c’est un vrai, un étonnant comédien ».

Paris découvre Bernard Sinclair en 1966 dans La Danseuse aux étoiles, au théâtre Mogador où il reviendra, en 1970, pour une reprise de Rose-Marie. Entre-temps, il enregistre de nombreux ouvrages pour le service lyrique de l’ORTF comme Les Dragons de l’Impératrice de Messager (1970), La Chauve-Souris, La Hussarde de Fourdrain, Roger Bontemps et La Tendre Alyne de Berthomieu (1973)… Il est engagé à l’Opéra-Comique où il participe à la création de La Chauve-Souris, dans les rôles du Prince Orlowski, puis de Gaillardin, et où surtout il incarne un Pelléas de rêve, tant vocalement que scéniquement (1969). On pouvait lire dans la revue Opéra de janvier 1970, sous la plume de Jean Goury :
« Foin donc des Pelléas souffreteux et compassés ! Bernard Sinclair prête au rôle une santé et une assurance du meilleur aloi. Il lui prête aussi – et la chose n’est pas moins rare – une voix correspondant à l’emploi… Le public semble l’avoir adoptée qui ne cesse de réclamer le chanteur sur toutes les scènes de France et de Navarre. Il est vrai que c’est dans un tout autre répertoire. Et pourquoi ne le demanderait-on pas maintenant dans celui-là ? Il y a là pour les directeurs de province une expérience à tenter. »

Bien des directeurs suivirent ce conseil comme Michel Plasson qui dirigea Bernard Sinclair pour une série de représentations de l’ouvrage au Capitole de Toulouse en 1973. A Paris toujours, on pourra l’applaudir, en 1972, dans « Il était une fois l’opérette » de Jean Poiret au Palais-Royal où il sera également l’amant de Madame de de Jean-Michel Damase, à l’Espace Cardin où il chantera le rôle du fils du sénateur lors de la création de La P… respectueuse, opéra du compositeur hongrois Kamilio Lendway d’après l’œuvre de Jean-Paul Sartre , et où il sera Aristée-Pluton lors de la reprise de Orphée aux Enfers d’Offenbach dans une mise en scène de Jorge Lavelli (1984). La même année, au Châtelet, il sera Eisenstein (Gaillardin) dans La Chauve-Souris.

En dehors de ses prestations parisiennes, les grandes scènes de province et des pays d’expression française accueillent Bernard Sinclair. Il y chante des rôles d’opéra-comique et d’opéra (Sylvio, Frédéric, Mercutio, Sharpless, Escamillo, Marouf, Pelléas…) et tout le répertoire d’opérette, genre où il excelle tout particulièrement, ses rôles de prédilection étant Paganini, Danilo de La Veuve joyeuse, Le Tsarévitch, Le Comte de Luxembourg, Rip, le Marquis des Cloches de Corneville, Brissac des Mousquetaires au couvent, Monsieur Beaucaire, Goethe de Frédérique, Strauss junior de Valses de Vienne, Sou-Chong du Pays du sourire qu’il chante dans la tonalité originale, ce qui est exceptionnel pour un baryton. En 1994, il aborde la comédie musicale avec une grande tournée de Hello Dolly ! (Vandergalder) qu’il jouera dans trente deux villes.

Tout au long de sa carrière, il enregistre sur disques de nombreux ouvrages.
Il compose une opérette dont le héros sera… un baryton ! Ainsi verra le jour Le Chevalier des Mers qui remporta un grand succès lors de sa création à l’Opéra de Nice en 1973 et fut repris sur de nombreuses grandes scènes lyriques de province, de Belgique et de Suisse.

Bernard Sinclaie nous a quitté en 2015. Esprit curieux de tout, c’est en menant déjà une carrière lyrique prometteuse que Bernard Sinclair avait terminé ses études de médecine et s’était spécialisé (quoi de plus naturel pour un chanteur ?) en oto-rhino-laryngologie. Il a ouvert, en 1975, un cabinet médical à Paris et s’était consacré particulièrement à la chirurgie de sa spécialité qui le passionne. Quand il décida d’interrompre momentanément ses activités professionnelles, celui qui incarna Jean Bart sur scène embarqua à Hyères, pour sillonner la Méditerranée, sur son voilier qui a pour nom « Chevalier des mers » !

Annik Caubert

Discographie

Intégrales

Valses de Vienne : Mady Mesplé, Christiane Stutzmann, Bernard Sinclair, Philippe Gaudin,. Direction : Jean Doussard.
Coffret Emi 2 disques C191-12001/2 réédité en album 2 CD n° 574103-2.

La Fille de Madame Angot : Mady Mesplé, Christiane Stutzmann, Bernard Sinclair, Charles Burles. Direction : Jean Doussard.
Coffret Emi 2 disques C161-12500/1 réédité en album 2 CD n°574082-2

Les Cloches de Corneville : Mady Mesplé, Christiane Stutzmann, Bernard Sinclair, Charles Burles. Direction : Jean Doussard
Coffret Emi 2 disques C163-12775/6 réédité en album 2 CD n°574091-2

Le Pays du Sourire (rôle de Gustave) : Michel Dens, Bernard Sinclair, Bernadette Antoine, Sylvia Paule. Direction : Yvon Leenart
Coffret Emi 2 disques CDM 769139/2 réédité en album 2 CD n°574097-2

La Chauve-Souris : Eliane Manchet, Annik Simon, Bernard Sinclair, Bernard Plantey. Direction : Adolphe Sibert.
Coffret 2 CD Sony Classical

Croquefer : Claudine Granger, Bernard Sinclair, Albert Voli, Yerry Mertz. Direction : Alfred Walter.
1 CD Bourg BG 2004

Sélections

La Veuve Joyeuse : Claudine Granger, Michèle Comanester, Bernard Sinclair, Christian Lara. Direction : Jean Doussard.
1 disque SPI Milan 160 065 réédité en 1CD 14 321 (distribution Laserlight)

Le Pays du Sourire (rôle de Sou-Chong) : Ana Maria Miranda, Brigitte Krafft, Bernard Sinclair, Philippe Fargues. Direction : Jean Doussard
1 disque Mondiolyric MO 1001 réédité en 1 CD Forlane UCD 16715

Victoria et son hussard : Claudine Granger, Elya Weismann, Bernard Sinclair, André Payol. Direction Emmanuel Koch.
1 disque TLP 91011

Hello Dolly ! : Claudine Granger, Sandrine Diard, Bernard Sinclair, Alain Dion. Direction : Daniel Furnemont
1 CD TLP C-35201

Balalaïka : Angélina Cristi, Sylvia Paule, Bernard Sinclair, Michel Henry. Direction : Alexandre Vanderdonckt
1 disque EPN 3045 réédité en 1 CD 011011.830 par Marianne Mélodie

Le Chant du Désert : Nicole Broissin, Josette Drouet, Bernard Sinclair, Michel Henry. Direction : Alexandre Vanderdonckt.
1 disque EPN 3044 réédité en 1 CD 011012.830 par Marianne Mélodie

Parade de printemps, L’île de rêve, Quand fleurissent les violettes : Claudine Granger, Marina Florence, Bernard Sinclair, Henri Murgue. Direction : Jean Doussard
1 disque Milan SPI A 160 133

La Danseuse aux étoiles : Bernard Sinclair. Direction : Jack Ledru
1 disque 45T Decca 460.992

Rose-Marie et Le chant du désert : Bernard Sinclair. Direction Jésus Etcheverry
1 disque 45T Emi C 015-11310

Le Chevalier des mers : Bernard Sinclair. Direction : Jean DoussardC1 disque 45T Emi C 015-12777

Bernard Sinclair chante Franz Lehar : Orchestre Jacques Metehen
1 disque Decca 105-019

Références

Voir également la rubrique « Bernard Sinclair, compositeur »

Vous retrouverez Bernard Sinclair dans « Opérette » n° 49, 66, 117 & 165. Si l’un de ces articles vous intéresse, vous pouvez le consulter en allant sur notre page « Revue “Opérette” »

Dernière modification : 09/02/2024

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