Toi c’est moi

Moïse Simons (1888-1945)

 

Le compositeur cubain Moïse Simons a composé deux opérettes pour les scènes parisiennes : Toi c’est moi (Bouffes-Parisiens, 1934) et Le Chant des tropiques (Théâtre de Paris, 1936)
Le livret de Toi c’est moi est signé Henri Duvernois, les couplets, Albert Willemetz, Bertal-Maubon et Chamfleury. L’ouvrage a été écrit pour les deux célèbres duettistes Pills et Tabet qu’entouraient Simone Simons, très médiatique elle aussi, Lyne Clevers, Pauline Carton, Ginette Leclerc, René Koval, et Duvaleix, tout ce petit monde sous la direction de Marcel Cariven, autre magicien incontournable des belles soirées de l’entre-deux-guerres.
Au soir de la première, le 19 septembre 1934, la partie est gagnée pour les auteurs et les artistes. Si le lieu de l’action convient bien à un musicien cubain et qui a dans le sang les rythmes exotiques dont il passe pour le spécialiste, le livret semble avoir été écrit pour les duettistes Pills et Tabet qui jouent, comme au music-hall, de l’échange des identités et de l’émulation conflictuelle qui caractérisent la situation, quand il ne s’agit pas de connivence objective.

La partition fait alterner les rythmes en vogue depuis plusieurs années avec les danses plus nouvellement apparues. Le one-step tient toujours une bonne place avec les deux duos chantés par Pills et Tabet, le tube « Pourquoi donc lorsqu’on s’aime » et les célébrissimes « Palétuviers » (Pauline Carton et Koval) ; le fox chanté par Koval « C’est dégoûtant » est une autre forme aimée du public ; la valse n’est pas oubliée avec l’air de Viviane, « Il est temps » ; mais ce dernier rythme prend dans l’opérette qui nous occupe plutôt l’allure du boston – c’est la valse anglaise – dans le Duo des Baisers, le chant du rossignol, ou encore dans l’air « Je suis l’homme du soir »; à défaut d’une rumba très orthodoxe, Moïse Simons introduit dans sa partition un fox-rumba (l’air de Bédélia), une conga fort réussie, « C’est ça la vie », et même une samba ; mais le tout s’intègre à des morceaux plus classiques (chœur de la gamme, avec les parties expressives de Bob suppliant Maricousa, romance, ensemble de la dispute en forme de quadrille…) qui font dire à un critique du temps que l’ouvrage constitue « un ensemble harmonieusement français sans aucune défaillance ».

Comme souvent à l’époque, l’opérette est devenue un film musical (1936) avec Pills et Tabet, le reste de la distribution étant renouvelée, en dehors de Pauline Carton ici également présente. Opérette injustement disparue du répertoire, Toi c’est moi est reprise au théâtre de l’Athénée Louis-Jouvet fin 2005 par la compagnie « Les Brigands » avant de partir en tournée.

D’après un article de Didier Roumilhac (Opérette n° 94)

L’argument

En cette année 1934, le jeune Bob Guilbert, seul héritier d’une tante richissime, fait valser dans les boîtes de nuit, l’argent de sa généreuse parente. Il y est aidé par son fidèle et inséparable ami, Patrice Duvallon, dit Pat, un sympathique pique-assiette : ce qui t’appartient m’appartient, donc toi c’est moi. Les dépenses du neveu devenant excessives, la tantine décide d’y mettre bon ordre en expédiant l’incorrigible fêtard aux colonies où elle possède une plantation de canne à sucre ; elle lui remet, pour le directeur Hernandez, une lettre contenant ses instructions.
Le jeune homme, que la discrétion n’étouffe pas, la décachète et apprend ainsi le sort qui lui sera réservé : pas de favoritisme, il devra « travailler comme un nègre », selon une expression qui avait cours en cette période. Il obtient de son ami Pat qu’il prenne sa place, sans évidemment lui préciser les termes de la missive, tandis qu’il l’accompagnera comme médecin en lui empruntant son identité : Toi c’est moi et moi c’est toi ! La vie est facile pour Bob qui s’éprend de Maricousa, fille d’Hernandez, sauvageonne sensuelle et directe. Pat, de son côté, trime sur les plantations et n’arrive pas à faire admettre sa véritable identité. Il adresse alors un télégramme à la tante Honorine, qui accourt, très inquiète pour la santé de son neveu.

Entre temps, est arrivée Viviane qui a dirigé son père, résident colonial, vers cette terre afin d’y retrouver Bob qu’elle avait remarqué dans la boîte de nuit le jour (ou plutôt la nuit) où le jeune homme a appris la décision de la tante. Après maintes péripéties, on voit se profiler le dénouement sous la forme d’un triptyque matrimonial. La tante Honorine que la magie des îles a littéralement métamorphosée, piétine ses anciens principes et tombe dans les bras de son gérant ; Pat retrouve sa véritable identité et épouse Viviane, Bob se réservant la belle Maricousa.

La parttion

Acte I :  Ouverture ; « Toujours pratique » (Pat) ; « Il est temps, je l’attends » (Viviane) ; « Je suis l’homme du soir » (Bob) ; « Toi c’est moi » (Bob, Pat) ; « Adieu Paris » (Pat et Bob) ; « Afin de plaire à son papa » ((Maricousa) ; « Quand je voyais durer sur l’écran » (Maricousa, Bob) ; Ensemble « Salut, gloire et honneur pour le gouverneur » ; Reprise et entrée du Résident ; « Quand il fait chaud » ; « Pour l’amour ou la moisson » (Maricousa) ; « Tu n’es qu’un salaud » (Bob, Pat) ; Final I « Toi c’est moi »

Acte II :  « C’est dégoûtant mais nécessaire » (Hernandez) ; « Moi tout faire pour te plaire (Bédélia) ; « Carmencita la gitana » (Viviane) ; Ensemble ; « Pourquoi se bercer de phrases » (Bob, Maricousa) ; « Pourquoi donc lorsque l’on s’aime » (Viviane et Pat) ; « Sous les palétuviers » (Honorine et Hernandez) ; Ensemble « Mes compliments les plus sincères » ; Final II

Fiche technique

Toi c’est moi
Opérette en 2 actes et 12 tableaux de Henri Duvernois, couplets de Albert Willemetz, Bertal-Maubon et Chamfleury, Musique de Moïse Simons, mise en scène de Georgé, décors de Deshayes.
Création à Paris, théâtre des Bouffes-Parisiens, le 19 septembre 1934. Avec :
Simone Simon (Maricousa), Lyne Clevers (Viviane), Pauline Carton (Honorine), Ginette Leclerc (Loulou/ Bédélia), Jacques Pills (Bob), Georges Tabet (Patrice), René Koval (Pedro Hernandez), Duvaleix (Robinet), Castrix (le gouverneur). Direction musicale, Marcel Cariven.
Editions Choudens

Discographie

Intégrale

Emmanuelle Goizé, Jennifer Tani, Marie-Louis Duthoit, Gilles Bugeaud, Gilles Favreau, Loïc Boisier. Orch. Benjamin Lévy.
Amiral-LDA Productions Label Tourbillon (1 CD)

Sélection

Lyne Clevers, Jacques Pills, Georges Tabet, Simone Simon, Pauline Carton, René Koval. Orch. Marcel Cariven.
12 extraits de Toi, c’est moi (un coffret EPM 982482 4CD « L’opérette française par ses créateurs » comprenant des extraits de 9 opérettes de la période 1921-1934)

Références

Vous retrouverez  Toi c’est moi dans « Opérette » n° 64, 94, 137, 138 & 172. Si l’un de ces articles vous intéresse, vous pouvez le consulter en allant sur notre page « Revue “Opérette” »

Dernière modification: 10/03/2024

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