Rip

Robert Planquette (1848-1903)

 

On le sait, Robert Planquette connut la célébrité avec Les Cloches de Corneville (1977), la seule des opérettes qu’il a composées encore régulièrement représentée de nos jours. À la création, Les Cloches se jouèrent un peu partout dans le monde et leur succès fut particulièrement net à Londres (1878). Il faut se rappeler qu’en cette deuxième moitié du XIX° siècle, les compositeurs français étaient fort prisés sur l’autre rive de la Manche. Avant Planquette, Hervé et Offenbach firent carrière à Londres; après eux,  Messager s’imposa dans la capitale anglaise comme compositeur, chef d’orchestre et directeur de théâtre.
Il n’est donc pas étonnant que Henry B. Farnie, auteur et producteur avisé, propose à Planquette d’écrire la musique d’une pièce jouée à Londres en 1865, elle-même tirée de Rip van Winkle, un conte de l’écrivain américain Washington Irving.

Cette histoire de fantômes hollandais fut créée sur la scène du Comedy Theatre de Londres (1882) : Rip Van Winkle or A Romance of Sleepy Hollow  dépassa les 400 représentations consécutives.
Bien entendu les auteurs songèrent aussitôt à une version française qui fut présentée à Paris, théâtre des Folies-Dramatiques sous le titre de RipRip, opéra-comique en 3 actes en 1884. Le succès fut moins évident qu’à Londres : 120 représentations seulement. Ce qui n’est pas mal tout de même si l’on considère qu’à l’époque, une pièce qui atteignait la centième était considérée comme un succès. Pour l’occasion le livret avait été remanié : on avait par exemple ajouté les personnages d’Ischabod et de Kate, absents dans la version anglaise.
Nouvelle version elle aussi modifiée pour la belle scène de la Gaîté en 1894. Rip passe de 5 à 7 tableaux et la fin de l’ouvrage est différente. Désormais, le héros n’a pas dormi 20 ans, il a seulement fait un mauvais rêve.

Rip est resté longtemps au répertoire des scènes françaises. Puis, comme bien d’autres chefs d’œuvre, il n’est aujourd’hui repris que d’une manière très ponctuelle. 

L’argument

(version 1894)

Acte I

À Kaatskill, petit village au bord de l’Hudson en 1763.
Une légende prétend que le capitaine Hudson a jadis caché dans la montagne un trésor ; elle assure également que celui qui le découvrira sera plongé pour vingt années dans un sommeil profond…
Ce jour-là, on célèbre l’anniversaire du roi Georges III d’Angleterre, avec un enthousiasme qui doit beaucoup aux exhortations du bourgmestre Derrick. Seul absent, Rip, le mari de la jolie Nelly, un sympathique et joyeux compagnon, mais paresseux en diable, qui passe son temps à parcourir la montagne.
Le bourgmestre entend punir Rip pour son absence lors de la cérémonie. Mais la véritable raison est ailleurs : veuf, Derrick souhaitait épouser Nelly, mais celle-ci lui a préféré le héros de l’histoire. On fait la connaissance de Nick, le patron de l’auberge, de sa fille, la gentille Kate, une luronne qui joue les timides, et de son amoureux, le jeune docteur Ischabod qui cherche désespérément à se faire la clientèle qui lui permettra d’être agréé par le papa.

Voici Rip. Dans un air célèbre, il chante les vertus de la paresse. Insidieusement Derrick suggère que les perpétuelles promenades de Rip en montagne pourraient avoir pour but de conspirer contre le roi. Petite dispute entre Nelly et Rip, la jeune femme reprochant à son époux sa paresse et son manque d’ambition, mais ce dernier la rassure : elle sera bientôt riche. D’ailleurs, lorsque Derrick exige le remboursement d’une dette, il paie rubis sur l’ongle… avec de l’argent français. Le bourgmestre s’empresse d’accuser Rip de comploter avec l’ennemi et veut le faire arrêter. Rip se sauve dans la montagne.

Acte II

Dans la montagne de Kaatskill.
Nelly et les femmes du village sont à la recherche du fuyard qu’elles finissent par retrouver à la nuit. Rip a le temps d’expliquer à sa femme qu’il a trouvé le trésor avant de se cacher pour éviter Derrick et ses hommes. Tout le monde rentre au village et Rip s’apprête à déterrer le trésor. Il boit la moitié de sa gourde pour se donner du cœur à l’ouvrage mais bientôt terrassé par la fatigue, il s’endort…
Et c’est le rêve… Rip voit apparaître un nain, puis une vallée et au fond un lac de feu tout autour des montagnes, enfin des fantômes avec à leur tête le capitaine Hudson…

Acte III

Premier tableau :
À Kaatskill, 20 ans plus tard…
On célèbre ce jour-là le mariage de Derrick et de Nelly. Jack, le fils de Derrick et Lowena, la fille de Nelly et de Rip, vont également bientôt convoler en justes noces. Ischabod et Kate aujourd’hui unis ont une nombreuse progéniture : ils ont dix-huit rejetons.Rip arrive au village. Il est vieilli, ses vêtements sont en lambeaux. Tout est changé et il a du mal à retrouver ses repères. Il rencontre Kate avec ses enfants et n’y comprend goutte ; Nelly et Rip ne se reconnaissent pas et se disputent. Apercevant Jack et Lowena, qu’il prend pour Nelly, s’embrasser, il veut s’interposer… Bref, il est complètement perturbé et l’assistance le prend pour un fou… Il finit par comprendre que vingt années ont passé. Lowena le reconnaît mais Derrick le fait chasser du village.

Deuxième et troisième tableaux
Le décor de l’acte II et retour à la réalité. La fête de Georges III bat son plein… Seule Nelly est triste : Rip a disparu. On l’appelle, il entend, il se réveille, mais ne retrouve pas tout de suite ses esprits. D’autant que beaucoup de choses ont changé au village pendant son sommeil : Ischabod et Kate, le papa aubergiste et sa servante vont se marier, le gouvernement a acheté sa maison et Rip est désormais riche… Enfin il comprend que ce n’était qu’un rêve et exulte : « il n’y a qu’un bonheur, voyez-vous, c’est d’être jeune ! ».

La partition

Acte I : Ouverture ; Chœur, scène « Vive le meilleur des rois », et couplets « Je punirai ce misérable Rip » (Derrick) ; Air « Vive la paresse » (Rip) ; Chanson « Quel chagrin, hélas, dans ma vie » (Nelly) ; Légende « Aux montagnes de Kaastkill » (Rip) ; Duetto « Il est un pays où mon rêve » (Nelly, Rip) ; Couplets à 2 voix « L’avenir avec ses féeries » (Ischabod-Kate) ; Couplets « Ecoutez, je vais tout vous dire » (Nick) ; Trio « Mes enfants, sachez qu’en ménage » (Rip, Lowena, Jack) ; Final I « Doux instants de la vie ».

Acte II : Entracte ; Chœur des lanternes « Par monts et chemins » ; Romance « Pour marcher dans la nuit obscure » (Nelly) ; Couplets « Si je la veux, cette immense richesse » (Rip) ; Chœur de la patrouille « Marquons le pas ! » ; Quatuor « Amour, douce ivresse » (Nick, Jacinthe, Kate, Ischabod) ; Chanson de l’écho « Non, trembler c’est folie » (Rip) ; Scène et chœur « Ah ! », et Chanson « On m’appelle Hendrick Hudson » (Hudson) ;  Chanson à boire et finale II « Ce n’est pas la bière ».

Acte III : Chœur des bûcherons « Hardi ! la cognée » ; Chœur des buveurs et des jeunes filles « Fêtons les nouveaux époux ! » ; Couplets « Un’ bonn’ foi pour tout’s » (Kate et les enfants) ; Air de la lettre « Oh ! non, pour les amours » (Lowna) ; Duetto « Mais r’gardez-le donc » (Nelly-Rip) ; Duetto « Tu savais me défendre » (Lowena, Jacques), Chanson « Au sein des mers » (Rip) ;  Trio « Mais non, je ne vous connais pas !… C’est malgré moi si j’ose » (Lowna, Jacques, Rip)  ; Final III « Où donc est-il le brigand ? ». Chœur « Ohé, Rip ! » ; Air de la jeunesse « O jeunesse » (Rip) ; final III « C’est un rien, un souffle un rien » (tous)

Fiche technique

Rip van Winkle
Opéra-comique en 4 actes d’ Henry B. Farnie ; musique de Robert Planquette. Création à Londres, Comedy Theatre, le 14 octobre 1882 sous le titre Rip Van Winkle or A Romance of Sleepy Hollow
Rip-Rip
Version française de Henri Meilhac, Philippe Gille et Henry B. Farnie, créée à Paris, théâtre des Folies-Dramatiques, le 11 novembre 1884, avec :
Mmes Scalini (Nelly), Mily-Meyer (Kate), MM. Brémont (Rip), Simon-Max (Ischabod)
Rip
Deuxième version française (version actuellement représentée) en 3 actes et 7 tableaux, créée à Paris, théâtre de la Gaîté le 18 octobre 1894, avec :
Mmes Bernaërt (Nelly), Mariette Sully (Kate), Renée Marcelle (Jacynthe), MM Soulacroix (Rip), Dekernel (Nick), Paul Fugère (Ischabod), Mauzin (Derrick), Bernard (Pickly), Nivette (capitaine Hudson).
Editions Choudens

Discographie

Intégrale

Lina Dachary, Freda Betti, Charles Dagueressar, Jacques Pruvost. Direction musicale, Marcel Cariven
Musidisc 201602 (1CD)

Sélection

Liliane Berton, Monique Linval, Michel Dens, Claude Devos. Direction musicale, Jules Gressier
1 disque 33T 30 cm EMI C 05112899 repris sur CD EPM (2CD comprenant également des extraits des « Noces de Jeannette » et des « Mousquetaires au couvent »)

Liliane Berton, Monique Linval, Michel Dens, Claude Devos. Orch. Jules Gressier
Sélection du Reader’s Digest CD 3159.9 (réédition 33t EMI) (3 CD) (+ « Monsieur Beaucaire » [Messager] + « Les Noces de Jeannette » [Massé]+ « Les Mousquetaires au Couvent » [Varney])

Références

Vous retrouverez  Rip dans « Opérette » n° 55, 85, 125, 127, 163, 165 & 172. Si l’un de ces articles vous intéresse, vous pouvez le consulter en allant sur notre page « Revue “Opérette” »

Dernière modification: 04/03/2024

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