Sandrine Seubille est une comédienne qui alterne le théâtre et la comédie musicale, tout en assurant la formation de jeunes artistes au cours Florent en tant que professeur de chant. Nous pouvons la voir actuellement dans la pièce Les Téméraires à la Comédie Bastille et à la rentrée dans le spectacle musical La voix d’or.
. Aviez-vous dès le départ envisagé d’embrasser une carrière artistique ?
En fait, pas du tout ! Il n’y avait pas d’artistes dans ma famille. Je suis issue des Côtes d’Armor, où mon seul lien avec la culture était la bibliothèque. La découverte avec le théâtre s’est donc faite au travers des livres, puis au lycée. Un accident de ski à l’âge de 17 ans m’a fait arrêter la danse…
. Vers quel métier étiez-vous destinée ?
Après Hypokhâgne, j’ai obtenu une maîtrise de lettres modernes (option théâtre) et les écrits du C.A.P.E.S dans la même discipline. L’envie du théâtre restait cependant présente et les week-ends demeuraient consacrés – en tant qu’amatrice – à cette discipline. Ce n’est pas un hasard si mon mémoire de maîtrise portait sur Urfaust de Goethe, spectacle mis en scène par Dominique Pitoiset. Cette première rencontre se révéla décisive pour conforter mon envie de ne pas devenir enseignante… mais comédienne !
. Ce fut donc le départ pour la grande aventure à Paris…
Après un premier prix du Conservatoire National d’Art dramatique de Brest, j’ai intégré directement la 3ème année de l’École Florent (Eric Ruf étant mon professeur). Diplôme en poche, tout s’est véritablement accéléré. J’ai intégré l’année suivante (après le cours Florent) l’École du Théâtre National de Chaillot dirigée par Jérôme Savary.
Je devais impérativement apprendre et me perfectionner au chant, discipline que j’avais dû délaisser auparavant. C’est ainsi que, grâce au travail entrepris avec Christiane Legrand et avec Patrice Peyriéras, j’ai trouvé ma tessiture de voix – plutôt mezzo.
Je découvre également tout un univers musical, dont celui de Jacques Demy et de Michel Legrand.
. Les portes se sont alors ouvertes en côtoyant ces personnalités…
Effectivement, alors que j’étais encore élève à Chaillot, Savary m’a offert une participation dans son spectacle Nina Stromboli et fait découvrir le monde de l’opéra. J’ai participé à sa production de Rigoletto (Opéra Bastille), une occasion supplémentaire d’appréhender l’opéra.
De même, cooptée par un réseau de musiciens, j’ai intégré en tant que soliste le Moulin-Rouge : quatre années d’une expérience unique mais solitaire. Néanmoins, l’esprit de troupe me manquait… Je l’ai rapidement retrouvé, notamment en travaillant avec Jean-Philippe Daguerre (Le Bourgeois gentilhomme).
. Votre premier rôle marquant en comédie musicale ?
Je le dois à Olivier Benezech qui m’a confié le rôle de Tzeitel dans Un Violon sur le toit, que nous avons joué à Paris puis en tournée. Ensuite, Ned Grujic m’a offert le rôle de la professeure de danse dans Fame (également au Comédia à Paris).
D’autres personnages m’attendaient, tels que Mme Thénardier dans Les Misérables (Lausanne). En outre, j’ai eu le plaisir de participer à de brillantes productions, comme Le Bal des vampires (Roman Polanski), ou Jack l’Éventreur de Whitechapel – spectacle où la chance m’a été offerte de rencontrer et de collaborer avec d’excellents professionnels, tels Samuel Sené, Jean Franco, Guillaume Bouchède ou encore Michel Frantz – pour ne citer qu’eux…
. Parlez-nous maintenant de l’aventure de Chicago à Mogador…
J’étais loin d’imaginer que le rôle de Mama Morton me reviendrait un jour ! Aventure incroyable de jouer dans cette mythique production… La chorégraphe Tania Nardini nous a insufflé son énergie, pour le résultat que l’on sait ! J’ai alors retrouvé le parfait équilibre que j’affectionne entre le théâtre et la musique. Au demeurant, recevoir le trophée du meilleur second rôle de la comédie musicale en 2019 m’a naturellement comblée !
. Nous savons que, pour vous, “transmettre” demeure primordial …
En effet, j’ai obtenu mon diplôme d’État de Musique Actuelle et j’enseigne le chant (technique vocale) dans la classe libre, section Comédie musicale au Cours Florent depuis plusieurs années. Cette mission me tient toujours particulièrement à cœur… J’aime décidément la dynamique du travail de groupe !
. Théâtre et musique figurent au programme des mois à venir.
L’aventure de Mme Zola dans Les Téméraires (mis en scène par Charlotte Matzneff) se poursuit à la Comédie Bastille. En parallèle, je répète actuellement le spectacle musical d’Eric Bu, La Voix d’or (créé à Avignon en 2023), qui sera repris au La Bruyère en septembre prochain. Il n’existe – selon moi – aucun clivage entre le théâtre, la comédie musicale et l’activité de chanteuse solo.
. Des ouvrages que vous aimeriez aborder ?
Je pense à l’œuvre de Sondheim, qui foisonne de beaux rôles parmi lesquels Follies, Little Night Music, Sweeney Todd, ainsi qu’à celui de Mrs Peachum (Opéra de quat’ sous) ou encore à Gypsy Rose Lee (Gipsy).
. Le mot de la fin ?
J’aurais envie de raconter des histoires, encore et toujours, en jouant et en chantant, envie d’être bouleversée par des aventures humaines et artistiques palpitantes, jusqu’à devenir… une vieille dame aux cheveux gris !
Propos recueillis par Philippe Pocidalo
02 mai 2024.