Eve Coquart
mercredi 13 mars 2024

Eve Coquart

Eve Coquart (© CAO)

Eve Coquart qui vient de prendre les fonctions de directrice générale et artistique de Clermont Auvergne Opéra nous a reçus dans ses locaux des bâtiments historiques du Bon Pasteur au cœur du vieux Clermont.

Quel parcours vous a-t-il conduite jusqu’à Clermont-Ferrand ?

En fait je suis ardennaise. Je suis née et j’ai grandi dans une famille nombreuse où tout le monde faisait de la musique. J’y ai été plongée toute petite. Dès l’âge de quatre ans j’ai débuté l’étude du violoncelle. Je n’ai commencé à m’intéresser au chant que plus tard, vers seize, dix-sept ans. En fait j’ai eu une sorte de révélation alors que, comme violoncelliste, je me trouvais dans la fosse à accompagner un représentation de la Vie Parisienne. C’était à Charleville-Mézières. Il s’agissait d’une compagnie amateur appuyée par des professionnels. À la sortie de la fosse j’ai dit : « c’est cela que je veux faire » .
C’est ainsi que je me suis engagée dans l’étude du chant puis dans la carrière. Je l’ai poursuivie pendant quatorze ans comme soprano. J’étais basée alors à Paris. J’y ai créé la société Instants Lyriques qui exerce dans l’événementiel. J’ai découvert Clermont-Ferrand dans ce cadre professionnel. J’y suis venue à plusieurs reprises et j’ai été frappée par le dynamisme culturel, la variété de l’offre culturelle et l’importance de la jeunesse dans cette ville. Par la suite, pour des raisons personnelles, je m’y suis fixée, plus exactement je me suis fixée à Chamalières. J’ai poursuivi mon d’activités dans le domaine de l’événementiel, toujours en rapport avec le lyrique, cela m’a permis une ouverture sur diverses faces du tissu social. j’ai aussi fondé à Chamalières l’association Voix Dehors qui s’intéresse entre autre aux tout petits et à leur initiation aux domaines du son.

Vous dites que votre vocation pour le lyrique est née dans la fosse de la Vie Parisienne, quel est votre rapport à l’opérette ?

Je suis amoureuse de l’opérette, de l’opéra-comique et plus largement du répertoire français à cause de sa force immédiate. Ce fut d’abord une question d’émotion spontanée. J’ai été tout de suite séduite par cette forme de théâtre, son langage direct, où l’on bouge, on doit jouer la comédie. J’adore jouer la comédie, j’ai d’ailleurs joué les Précieuses Ridicules dans le off d’Avignon. D’autre part, avec l’opérette on se trouve presque fatalement dans un esprit de troupe. J’adore l’esprit de troupe : on travaille vite, on s’écoute moins, on est dans le faire-ensemble. C’est cet esprit-là que j’ai retrouvé avec joie au festival d’opérette de Lamalou. Je l’ai intégré après sa reprise par Annie Grenier et TLA production. J’aimais cette effervescence créatrice. Lamalou est vraiment l’endroit incontournable. J’y fait de belles rencontres. J’étais très impressionnée par une personnalité comme Claude Deschamps qui est vraiment un pilier de l’institution. Il lui suffit d’entrer en scène pour enlever une salle.

Comment voyez-vous votre action à venir dans ce domaine ?

On est malheureusement face à une assez grande méconnaissance, à des idées reçues, je n’ose pas dire à un certain mépris. J’ai pourtant la conviction que c’est une forme incontournable si on veut intéresser les jeunes. J’ai constaté par expérience qu’ils y entrent spontanément. Je suis convaincue que l’opérette est une belle porte d’entrée sur l’opéra et le lyrique en général. J’attache un prix particulier à un répertoire qui concerne toutes générations. Le répertoire français est déterminant car il permet une approche immédiate. Il y a bien sûr les grands standards mais je crois qu’il faut sortir des titres trop facilement programmés, je pense à des œuvres comme justement la Vie Parisienne, la Veuve Joyeuse, etc. Cela ne veut certes pas dire qu’il faille y renoncer. Il faut répondre aussi au public qui aime et attend ces titres, mais je pense qu’il faut aussi aller vers des formes inattendues qui surtout puissent surprendre.
C’est d’abord le public des 30/45 ans qui fait défaut au lyrique. Ce public-là n’est pas inaccessible mais il demande qu’on le surprenne. Il faut prendre des risques, ne pas hésiter à proposer des formules nouvelles. Je pense à des expériences faites au cours de mon activité dans l’événementiel où un public très éloigné du lyrique et très mêlé exprimait après coup le plaisir qu’ils avaient eu à écouter, par exemple, le « duo de la mouche » d’Orphée aux Enfers qui était pour eux une vraie découverte. Il ne faut pas hésiter à tenter des expériences nouvelles.
J’aime l’idée de faire rêver les gens. J’attache de l’importance à la possibilité d’aller à la rencontre d’un public qui n’a pas l’habitude ou l’opportunité d’aller vers la scène lyrique. Des formes innovantes peuvent permettre d’être présentées dans des lieux pas forcément destinées au théâtre lyrique. C’est un atout. Cependant, dans mon esprit, il est clair que nous devons aller vers ces publics, car il n’y a pas – un, mais des publics -, dans le but qu’à leur tour ils viennent à nous. L’opéra-théâtre de Clermont-Ferrand est d’ailleurs le lieu idéal pour le répertoire d’opérette et d’opéra-comique. Je ne peux rien dire de la programmation 2024-2025, déjà bien avancée et qui sera dévoilée lors de la présentation de la saison en Juin

Comment concluriez-vous ?

Je pense vraiment que l’opérette a de belles années devant elle.

Propos recueillis par Gérard Loubinoux

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