La Belle de Cadix est de retour au Théâtre du Casino, toujours avec ses yeux de velours, fort heureusement, mais sérieusement rajeunie ! La présentation de l’œuvre offerte par Le Renouveau Lyrique est, aujourd’hui, proche d’une comédie musicale de poche : action resserrée, dialogues écourtés, mais nous ne nous en plaindrons pas.
La production originale à petit budget de 1945, montée à la hâte au Casino Montparnasse, allait ouvrir la voie à l’opérette à grand spectacle, et ce pendant un quart de siècle. D’Andalousie (1947) jusqu’à Gipsy (1971), Francis Lopez enchaîne des succès inégalés, offrant du rêve à des milliers de spectateurs – tant à Paris qu’en tournée. Luis Mariano, Rudy Hirigoyen, José Todaro et bien d’autres seront les ambassadeurs de cet âge d’or que connut l’opérette avant un déclin inéluctable.
Les goûts du public changent : c’est donc très courageux de continuer de monter des spectacles parfois jugés surannés car bien éloignés des musiques actuellement en vogue.
─ Le spectacle
La distribution, composée de jeunes et talentueux artistes, nous a séduits.
Fanny Crouet, soprano régulièrement invitée par la compagnie, incarne une Maria Luisa idéale. Diplômée de l’École Normale de Musique de Paris et lauréate de nombreux prix, elle démarre sa carrière avec des rôles pyrotechniques de colorature (Reine de la nuit dans La Flûte enchantée, la fée dans Cendrillon) et interprète avec aisance les opérettes de Johann Strauss ou d’Offenbach, sans oublier le répertoire belcantiste qu’elle affectionne tout autant. Elle se dit ravie de cette prise de rôle qui comporte de nombreux airs de haute voltige, comme elle le précise avec humilité.
Face à elle, Fabio Sitzia, un jeune ténor Rémois, diplômé lui aussi d’un master en musicologie, solide guitariste rapidement conquis par le métier de chanteur. Quel challenge de reprendre le rôle de Carlos à la suite de prestigieux artistes, mais nous lui faisons entièrement confiance pour suivre un beau parcours lyrique !
Le traditionnel couple de fantaisistes ne déçoit nullement ; nous découvrons la jeune Camille Le Bail – également violoniste – dans le rôle de Pepa, dotée d’un fort tempérament face à Thomas Marfoglia (Manillon), lequel est versé autant dans la comédie musicale que dans le théâtre. C’est une satisfaction réelle de constater la diversité de talents réunis dans une génération d’artistes pluridisciplinaires, qui se donnent à fond pour un métier qui devient difficile…
Laure Crumière toujours au top incarne une pétulante Miss Hampton.
Les agréables chorégraphies de Martine Cot arrivent fort à propos pour un spectacle pétillant, dont l’ambition n’est autre qu’une escapade bienvenue pendant deux heures. La sympathique équipe d’Emmanuel Marfoglia, certes réduite mais efficace, connaît la musique et continue la route qu’il suit depuis de nombreuses saisons, avec foi et détermination.
Rendez-vous cet été en Occitanie avec Le Renouveau Lyrique qui nous présentera La Vie parisienne et La Chauve-souris.
Philippe Pocidalo
30 avril 2024
Fiche technique. Mise en scène : Emmanuel Marfoglia. Direction musicale : Louis-Vincent Bruère. Chorégraphie : Martine Cot. Orchestre, chœur, ballet et décors du Renouveau Lyrique.
Distribution. Fanny Crouet (Maria Luisa); Camille Le Bail (Pepa); Laure Crumière (Miss Hampton) ; Fabio Sitzia (Carlo Medina) ; Thomas Marfoglia (Manillon) ; Jean-Noël Ferrel (Dany Clair) ; Franck Gouffan (le roi des gitans). Emmanuel Marfoglia (Ramirez).