Im memoriam : Monique Stiot (1930 – 2023)

Im memoriam : Monique Stiot (1930 – 2023)

L’une des dernières artistes des émissions lyriques de l’ex ORTF, Monique Stiot nous a quittés, le 15 décembre dernier, à l’âge de 93 ans. Elle avait chanté plus de 200 œuvres différentes à la radio et était apparue dans quelques opérettes montées par Henri Spade pour la télévision.
Toutes nos condoléances à Paul, son mari et à sa famille.

Nous lui rendons hommage en reprenant ici une grande partie de l’interview qu’elle nous avait accordée en septembre 2020, et dans laquelle elle évoquait sa carrière de soprano léger fantaisiste. Puis, en janvier 2022, elle avait été invitée dans l’émission de Benoît Duteurtre, Étonnez-moi Benoît.

. Quels ont été vos débuts ?
Ma famille, issue du Berry et de la Nièvre, s’installe ensuite à Paris où se sont déroulées mes études. Bercée toute jeune par la musique, mère bonne pianiste et père doté d’une jolie voix, je chante souvent et rêve de la scène. Mais ma première vocation, bien qu’ayant étudié le chant, est pour le théâtre. Admise en auditrice libre de la classe d’opérette du Conservatoire de musique, je rencontre René Simon qui y assure un cours de comédie pour les chanteurs. Suivant ses conseils je me présente et suis reçue en 1952 au Conservatoire National d’Art dramatique et entre dans la classe de Béatrix Dussane. Cependant, l’envie de chanter me taraude toujours. Lors d’un séjour en Angleterre une audition me permet d’espérer une carrière malgré une voix toute petite mais riche en harmoniques. Je me rends alors à Milan, où un vieux professeur me fait travailler l’émission et réussit à “sortir” ma voix, puis, pendant plusieurs mois à Venise, je travaille avec l’illustre Toti Dal Monte.
De retour en France, je m’inscris à l’Académie internationale que Charles Imbert vient de créer à Vichy pour familiariser les jeunes artistes au métier avec des metteurs en scène désireux de secouer les traditions poussiéreuses. Ce stage, une expérience formidable, m’a permis de rencontrer Georges Prêtre, Louis Erlo, Roberto Benzi, Serge Baudo… Passionnée d’opéra, j’aurais aimé chanter la Lucia, les Verdi… mais il me fallait être réaliste, aussi ai-je opté pour l’opérette.

C’est à ce moment que vous êtes engagée à la radio ?
Oui, en 1966. Reçue sans problème pour la section opérette, après épreuve de texte parlé et de chant, suit la section lyrique où je présente des airs de Werther (Sophie) et de Pelléas (Yniold) ; les jurés trouvent évidemment ma voix trop petite mais Georges Thill pense que je peux remplir certains emplois et c’est ainsi que je suis admise pour les rôles d’enfant ou de jeune femme nécessitant une voix fraîche, ma formation théâtrale me permettant par ailleurs de camper très vite un personnage.

Suivront de nombreux enregistrements…
En effet, sans doute plus de 250, dans des ouvrages d’Offenbach, Hervé, Lecocq, Audran jusqu’à Christiné et Yvain, avec, pour moi, une préférence pour Nicolo (Les Rendez-vous bourgeois), Hahn (Ô mon bel inconnu), Messager (Passionnément) et Beydts (Moineau). J’ai également participé à la création de l’opéra Les Canuts de Joseph Kosma et fait quelques apparitions dans les opéras contemporains.

Les conditions de travail étaient-elles satisfaisantes ?
Il fallait travailler très sérieusement et vite car nous avions peu de répétitions et les chefs étaient, à juste raison, exigeants, mais l’ambiance y était bonne et mes collègues tout à fait charmant. Je pense en particulier à Linda Felder, très belle, avec une voix ravissante, à Joseph Peyron, on ne peut plus adorable, à Christiane Harbell, ou à Jean-Christophe Benoît véritable boute en train.
Pour Henri Spade, à la télévision, j’ai joué dans Le Bonheur Mesdames, Trois valses, Moineau… et participé au tournage des téléfilms Hortense Schneider et La Dame de pique de Tchaïkovski, en français.

. Etiez-vous tentée par la scène ?
J’aurais pu en faire plus mais j’étais tenue par la radio et par certaines obligations familiales qui m’ont obligée à limiter mes déplacements. J’ai néanmoins un peu chanté en province : dans le Sud, à Lille (Les P’tites Michu) mais aussi à Genève : la grisette Manon de La Veuve joyeuse, Oreste de La Belle Hélène, Cupidon d’Orphée aux Enfers, rôle pour lequel le grand décorateur Jean-Denis Malclès m’avait taillé un ravissant costume aux ailes dorées. J’ai également tenu des petits rôles dans certains opéras comme Louise au San Carlos de Lisbonne.

La disparition du service lyrique a dû être pénible ?
Certes, mais je commençais à me lasser de ces rôles qui ne correspondaient plus à mon âge et j’ai retrouvé un emploi dans une société de cinéma où je m’occupais du choix des illustrations musicales pour des films ou des documentaires. Puis, la retraite venue, mon mari et moi sommes venus nous installer à Poitiers, dernière étape d’une vie passionnante.

Propos recueillis par Bernard Crétel

 

 

Imprimer
Cookies
Nous utilisons des cookies. Vous pouvez configurer ou refuser les cookies dans votre navigateur. Vous pouvez aussi accepter tous les cookies en cliquant sur le bouton « Accepter tous les cookies ». Pour plus d’informations, vous pouvez consulter notre Politique de confidentialité et des cookies.