Concert à la Bibliothèque musicale de La Grange-Fleuret
mercredi 11 décembre 2024

Concert à la Bibliothèque musicale de La Grange-Fleuret

Bibliothèque musicale de La Grange-Fleuret

Ce très bel hôtel particulier parisien, à l’architecture caractéristique de la seconde moitié du XIXème siècle, abrite la Bibliothèque musicale de La Grange-Fleuret (BLGF), jusqu’à présent connue sous l’appellation Médiathèque Musicale Mahler. Maurice Fleuret et Henry-Louis de La Grange qui en furent les propriétaires avaient souhaité par leurs legs mettre à la disposition d’un large public leurs collections personnelles.
Rénové entre 2019 et 2021, ce lieu associe des espaces de conservation, de documentation, de consultation, de pratique artistique, de formation, avec deux salons de musique à l’acoustique remarquable et même un studio de résidence pour les chercheurs et les artistes.
La BLGF conserve aujourd’hui quarante fonds d’archives dont un fonds Mahler exceptionnel ainsi qu’une bibliothèque de 30 000 volumes, une discothèque de 50 000 références, une partothèque de 16 000 partitions, une photothèque de plus de 8000 références et 200 collections de revues, dont 60 en cours… Impressionnant !

Depuis 2016, dans le cadre d’une coopération culturelle renforcée, la Fondation Royaumont et la BLGF ont réuni leurs fonds documentaires et patrimoniaux sous une même bannière dénommée « Bibliothèques Royaumont ».

La rédaction

Un musicien à découvrir : Jean Cras, le marin compositeur

Il y a quelques semaines, la Bibliothèque musicale la Grange-Fleuret nous conviait à assister à un étrange récital, centré sur la figure du musicien et officier de marine Jean Cras, dont l’œuvre brille de l’éclat sombre des grands oubliés.
On l’a oublié après sa mort en 1932. On a d’ailleurs oublié d’autres compositeurs de sa génération, Ropartz, Bordes, Magnard, Le Flem, Déodat de Séverac… Puis on a redécouvert tardivement ses partitions à la faveur d’une série d’enregistrements discographiques, portés par le label Timpani. Ses influences sont multiples: sa Bretagne natale mais aussi, Duparc, son maître, son ami. Outre un unique opéra Polyphème, son œuvre reste axée sur la musique de chambre, le piano et la mélodie.

La soirée s’ouvrait par son testament, les Trois chansons bretonnes (1932) avant de retourner au Premier recueil de mélodies de jeunesse (1892), sur des vers de Victor Hugo. Parcourir l’univers musical de Jean Cras invite à entrer en poésie, comme on entre en religion, expérience unique et brûlante, Hugo, Verlaine, Rodenbach…

Pour servir ces fragments d’une beauté âpre et mélancolique où luit un lyrisme de bon aloi, il fallait une voix d’un charme sain, jeune et rassurant. Marthe Davost, qui incarna Mélisande à l’Athénée en février 2024, couvre une large palette expressive : on passe de la finesse la plus extrême (« Douceur du soir » 1901) à des accents plus abrasifs ou nostalgiques, l’ombre de Duparc… Pour l’interprète, ces mélodies sont l’occasion d’un investissement vocal qui va forcément de pair avec un investissement interprétatif – voire narratif – entier et toujours parfaitement dosé. L’ampleur lyrique est laissée de côté au profit d’une approche intime qui ne sacrifie néanmoins jamais la rondeur du son, ni la qualité de l’accroche et de la projection.

Autre atout de ce récital, entendre les Trois mélodies de Messiaen (1930) dont « Le Sourire », sur un poème de Cécile Sauvage, la mère du compositeur du Saint François d’Assise. Le récital s’est achevé sur une création mondiale, Âme prisonnière, du jeune Benoît Menut (né en 1977), sur des poèmes de Cécile Sauvage extraits du recueil « Mélancolie » (1909).

En somme un rendez-vous musical savamment ordonnancé, ayant tenu toutes ses promesses, avec en prime, Joseph Birnbaum qui se distingue au piano comme un remarquable accompagnateur. Enfin, réentendre ce soir, la musique enchantée de Jean Cras en présence de sa petite-fille, elle-même fille du compositeur Alexandre Tansmann, prenait pour nous, une valeur particulière.

François Caunac

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