Jacques Offenbach (1819-1880)
On a souvent prétendu que Ba-Ta-Clan était la plus réussie des bouffonneries, en un acte, issues de la féconde plume de Jacques Offenbach ; elle est sûrement l’une des plus folles et des plus échevelées ! Ailleurs, la folie se trouve encore canalisée ou bridée ; ici, elle est réellement intégrale et relève donc, plus que dans d’autres ouvrages, de l’esthétique du rival et ami de Jacques, Hervé.
L’ouvrage est joué avec quatre personnages. C’est le premier de ceux, qui furent créés au passage Choiseul, dans ce théâtre qui porte toujours, près de 150 ans après, le nom de Bouffes-Parisiens que lui donna Offenbach. On sait que celui-ci avait enfin réussi à ouvrir ses Bouffes – son premier théâtre! – en juillet 1855, au Carré Marigny, dans une espèce de baraque sur les Champs-Élysées, avec notamment ces Deux aveugles qui devaient lui apporter réputation et succès. Mais il lui fallait un endroit plus confortable pour l’hiver ; il trouve enfin chaussure à son pied. Les Bouffes ouvrent donc au Passage Choiseul le 29 décembre 1855, avec une « chinoiserie musicale », pour laquelle il a d’ailleurs obtenu une extension de son privilège : il peut désormais mettre quatre personnages en scène ! Bien sûr, il ne lui est pas encore permis d’aller au-delà d’un acte, et il n’y a pas encore de chœurs, mais la censure accepte tout de même un groupe de figurants, qui mime ce que ferait un chœur éventuel. Ah, s’il fallait y jouer une pièce se passant dans l’Olympe, par exemple, cela ferait plutôt maigre ! Et pourtant deux ans et demi après, à force d’efforts, ce sera dans ces Bouffes le succès écrasant, mondial, d’Orphée aux Enfers !
Avec Ba-Ta-Clan, Halévy signe pour la première fois de son nom un livret de haute qualité qui, d’emblée, s’appuie sur deux thèmes favoris d’Offenbach ; le pouvoir est basé sur une équivoque, tout est faux dans cette cour chinoise et personne n’est ce qu’il prétend être. Dans Ba-Ta-Clan, tous ces Chinois sont des Français, tant l’empereur que le chef des conjurés. Qui aurait pu s’empêcher de penser à la cour un peu improvisée de cet autre empereur, qui régnait sur la France ? L’autre motif est la glorification de Paris, de la vie parisienne, des bals et des plaisirs.
— L’argument
Nous sommes dans une Chine de fantaisie. Fé-Ni-Han, roi des vingt-sept sujets, a fait empaler par erreur cinq bourgeois qui ne méritaient qu’honneurs et distinctions. Tout cela parce qu’un complot se tramait contre lui et qu’il ignorait… le chinois ! car il est français; et Ké-Ki-Ka-Ko et Fé-An-Nich-Ton, membres de sa suite, sont deux parisiens échoués dans son royaume : un viveur déchu (le vicomte Alfred de Cérisy) et une ex-chanteuse à voix (Virginie Durand). Regrettant Paris, ces derniers décident de s’enfuir avec Fé-Ni-Han, qui craint toujours les conspirateurs. Mais leur chef, Ko-Ko-Ri-Ko, dévoile à son tour sa nationalité française. Il facilitera d’autant plus l’évasion du souverain qu’il convoite son trône !
Si cette histoire a pour titre Ba-Ta-Clan, c’est qu’il s’agit du chant révolutionnaire des conjurés.
— La partition
Introduction ; Marche, chœur et Quatuor chinois « Cloc clock moc mock »; Romance « J’étais aimable, élégante » (Fé-An-Nich-Ton) ; Duo « Te souviens-tu de la maison dorée ? » (Ké-Ki-Ka-Ko et Fé-An-Nich-Ton) ; Ronde de Florette (Fé-An-Nich-Ton) ; Duo italien « Morto ! Morto ! » ; Trio bouffe « Je suis français, il est français » ; Le Ba-Ta-Clan et final
— Fiche technique
Ba-Ta-Clan
« Chinoiserie musicale » en 1 acte de Ludovic Halévy, musique de Jacques Offenbach. Création à Paris, théâtre des Bouffes-Parisiens (salle Choiseul), le 29 décembre 1855. Avec :
MM. Pradeau (Fé-Ni-Han), Berthelier (Ké-Ki-Ka-Ko), Guyot (Ko-Ko-Ri-Ko), Mlle Darmont (Fé-An-Nich-Ton).
Editions Chappell
— Discographie
Sélections
Maryse Castet, Vincent Vittoz, Michel Hubert, Bernard Van der Meerch, Direction musicale, Dominique Debart
FT Pluriel PL 3374 (1CD) & PL3374 CD (1 CD)
Huguette Boulangeot, Raymond Amade, Rémy Corazza, René Terrasson. Direction musicale, Marcel Couraud
Album Erato DUE 20 240 (2 disques, 2ème disque : Les Bavards).
Anne Marie Sanial, Christian Baudéan, Jean Kriff. Marc Grimonprez, Guy Bernard.
SPI Milan SLPS9
— Références
Vous retrouverez Ba-Ta-Clan dans « Opérette » n° 50, 66 & 130. Si l’un de ces articles vous intéresse, vous pouvez le consulter en allant sur notre page « Revue “Opérette” »
Dernière modification: 26/02/2024