Quatre jours à Paris, Marseille (Odéon)
dimanche 17 mars 2024

Quatre jours à Paris, Marseille (Odéon)

“Quatre jours à Paris” Fabrice Todaro et Marie Glorieux  (© Christian Dresse(

Après avoir remporté le succès que l’on sait avec La Belle de Cadix (1945) et Andalousie (1947), deux opérettes « exotiques » à grand spectacle illuminées par la voix et le sourire ravageur de Luis Mariano, le tandem Francis Lopez, Raymond Vincy est pressenti pour donner à Bobino 4 jours à Paris.
Pour la circonstance, Raymond Vincy écrit un de ses livrets les plus divertissants, un vaudeville échevelé où se succèdent, à la manière des meilleures pièces de boulevard et sur un rythme frénétique, quiproquos et rebondissements. La mécanique de cette joyeuse opérette se développe tambour battant jusqu’au dénouement, avec des protagonistes qui usurpent des identités et se rencontrent au moment les plus inopportuns, reprenant ainsi la recette éprouvée des pièces de Georges Feydeau.
Le texte, constamment drôle, sans le moindre passage à vide, met en scène des personnages pittoresques : Hyacinthe, le directeur gay de l’institut de beauté, la volcanique et volage Amparita, femme du riche brésilien Bolivar, Zénaïde la servante « allumée » de l’Auberge « Chez Grand-mère » à Lapalisse et d’autres protagonistes tout aussi bien dessinés.
Pour sa part Francis Lopez démontre avec 4 jours à Paris son aisance à passer des chaleureuses couleurs hispaniques aux couplets à la française à la manière d’Henri Christiné ou de Maurice Yvain, avec des finals développés, sans oublier bien sûr les inusables tubes que sont « Paris-Champagne » et la « Samba brésilienne ».

À voir le public s’amuser et à l’entendre rire de bout en bout, on ne peut que constater que les situations, comme les répliques, font mouche et qu’il s’agit sur le plan du théâtre d’une des œuvres les plus efficaces de ce type de répertoire. En vingt-cinq ans, (1999, 2003, 2009, 2013, 2017 et 2024), le Théâtre de l’Odéon aura affiché à six reprises 4 jours à Paris. Pour cette nouvelle production, Lorant Martinel a conçu des décors à forme géométrique (l’institut de beauté) ou d’une symétrie dépouillée, conférant une allure moderne à l’ouvrage et les costumes d’aujourd’hui sont à l’avenant. Le tout donne à la pièce le ton d’une comédie musicale contemporaine ce qui s’accorde parfaitement à une distribution d’artistes sachant passer habilement d’un genre à l’autre. Les maîtres-mots sont ici « punch » et « brio ».

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Fabrice Todaro, Marie Glorieux et Claude Deschamps (© Christian Dresse)

Fabrice Todaro s’éloigne – à juste titre – de ténors comme Mariano (pour le film de 1955) ou Guétary (pour la télévision en 1977). Il convient de ne point oublier que le créateur du rôle de Ferdinand fut Andrex artiste marseillais souvent employé par Marcel Pagnol dans ses films mais également interprète de chansons. L’aisance en scène, la fantaisie et les qualités de comédien de Fabrice Todaro en font l’interprète adéquat de Ferdinand. Son air du 2ème acte « Aujourd’hui c’est mon jour de repos », détaillé à la manière d’un crooner, est exactement dans le style requis de cet ouvrage.

Julie Morgane croque avec gourmandise et son habituel humour déjanté une Zénaïde souillon et crasseuse à souhait, qui se transforme à la fin de la pièce en aguichante meneuse de revues. Elle déploie une énergie décapante et une drôlerie de tous les instants fondées sur des dons comiques innés qui lui valent de longs applaudissements dans ce « cheval de bataille » que constitue l’air « J’ai des mirages ».
Exception faite de Fabrice Todaro et Julie Morgane, tous les autres interprètes sont en prise de rôles.

4 jours a Paris 2 Perrine Cabassud et Julie Morgane
Perrine Cabassud et Julie Morgane (© Christian Dresse)

La sculpturale Marie Glorieux, dotée de multiples talents, partage sa carrière entre théâtre, chant et danse. On l’a remarquée dans « Je ne cours pas, je vole » (à la Comédie des Champs Élysées, 5 nominations aux Molières !), et avant cela, dans La Mélodie du Bonheur ou Chantons sous la pluie. Elle libère ici un tempérament de feu dans la bouillante Amparita avec « Paris champagne » et « Quelle nuit de printemps ! ».

Antoine Bonelli était devenu quasiment le titulaire du rôle de Hyacinthe à Marseille où l’on apprécie la rondeur, la bonhomie, la bonne humeur qu’il sait donner à son personnage. Avec le talent qu’on lui connaît, Claude Deschamps prend la suite, conférant au directeur de l’institut de beauté un humour différent mais pour autant piquant.
Nicolas Soulié, comédien protéiforme que l’on a apprécié dans les comédies musicales La Petite Fille aux Allumettes, les Aventures de Tom Sawyer, L’Abribus ou Le Songe d’une nuit d’été, s’affranchit des traditions et dépoussière véritablement le rôle de Nicolas.
Possédant une belle diction et une agréable voix de comédie musicale Camille Besnard nous livre une charmante Gabrielle dépourvue de mièvrerie.
Perrine Cabassud en Simone et Sabrina Kilouli en Clémentine chantent et dansent avec aisance et brûlent véritablement les planches dans leurs rôles respectifs.

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Toute la troupe (© Christian Dresse)

Tout le reste de la distribution ne mérite que des éloges avec une mention particulière pour Alvaro Ruault. Déjà remarqué pour son remarquable Jacob dans La Cage aux folles à l’Opéra de Nice (mise en scène par Serge Manguette), il se glisse avec autant d’aplomb que d’excentricité dans la peau d’un un très pittoresque Bolivar.

Avec un ballet particulièrement dynamique, cette joyeuse troupe s’est engouffrée dans le tourbillon effréné d’une mise en scène signée Carole Clin et celui impulsé par l’Orchestre de l’Odéon sous la baguette alerte de Bruno Conti.

Christian Jarniat
17 mars 2024

Fiche technique

Quatre jours à Paris (Lopez)
Direction musicale : Bruno Conti – Mise en scène et chorégraphie : Carole Clin – Orchestre de l‘Odéon.
Distribution :
Camille Mesnard (Gabrielle) – Marie Glorieux (Amparita) – Julie Morgane (Zénaïde) – Perrine Cabassud (Simone) – Sabrina Kilouli (Clémentine).
Fabrice Todaro (Ferdinand) – Nicolas Soulié (Nicolas) – Claude Deschamps (Hyacinthe) – Alvaro Ruault (Bolivar) – Didier Clusel (Montaron) – Jean Goltier (Le Professeur).

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